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Ventavon comme dans les négations de l’extrême droite, c’est l’anarchie et le chaos avec la chance d’une dissolution inévitable dans la confusion.

Que reste-t-il donc ? Il reste ce qui est possible, ce qui est dans la nature des choses présentes, ce qui peut être fait en tenant un juste compte de tout, de la puissance d’une situation aussi bien que des droits souverains du pays, même des réserves légitimes des partis. Les élémens d’une solution pratique sont là, ou ils ne sont nulle part. La monarchie ne peut être rétablie aujourd’hui, rien n’est plus clair ; n’eût-elle pour la rendre impossible en ce moment que ceux qui la défendent d’une certaine façon, cela suffirait amplement. La république existe de fait, et on ne peut la supprimer. M. le maréchal de Mac-Mahon est pour six ans président de cette république. D’un autre côté, la faculté de révision réservée pour l’expiration des pouvoirs du maréchal laisse au pays et aux assemblées le droit de s’inspirer d’une situation nouvelle, de maintenir ou de réformer ce qui aura subi l’expérience de six années. Dans ces limites, quoi de plus simple, de plus naturel et même de plus facile, si on le veut, que l’alliance de tous les hommes modérés pour créer les ressorts nécessaires d’une organisation sérieuse et efficace ? Est-ce là un régime définitif ou provisoire ? C’est l’existence du pays régularisée, fixée et assurée. C’est le système du centre gauche, qui a eu la fortune de trouver l’autre jour dans M. Laboulaye un défenseur d’une éloquence simple et séduisante. M. Laboulaye a parlé le langage de la raison et du patriotisme. Sans affectation, sans déclamation, il a tout dit avec autant de délicatesse politique que d’art, et, si l’on eût voté le soir même sous l’impression de ce discours, la victoire pouvait être enlevée dès ce moment. M. Laboulaye n’a pu faire réussir son amendement au vote, qui n’a eu lieu que le lendemain ; mais certainement il a contribué au succès de l’amendement que M. Wallon a présenté à son tour deux jours après. Au fond, c’est la même idée sous des formes différentes. L’amendement de M. Laboulaye disait que « le gouvernement de la république se compose de deux chambres et d’un président. » L’amendement de M. Wallon dit : « Le président de la république est élu par le sénat et la chambre des députés réunis en assemblée nationale. Il est nommé pour sept ans ; il est rééligible. » Dans les deux amendemens, c’est la république, toujours, bien entendu, dans les conditions de la loi du 20 novembre, avec M. le maréchal de Mac-Mahon et aussi avec la faculté de révision réservée ; seulement la rédaction de M. Wallon a semblé plus conciliante à quelques membres du centre droit qui, avec le centre gauche, la gauche, ont formé une majorité.

Quelle majorité ? Une voix seulement ! C’est bien peu sans doute ; ce qui est plus grave, c’est qu’il en résulte évidemment une situation nouvelle où peut se former enfin une majorité d’organisation constitutionnelle, si le centre droit est assez bien inspiré pour entrer dans la voie où