Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 8.djvu/626

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et les clauses que l’on avait établies, n’étant pas suivies d’effet, furent pour les contractans indigènes lettre morte. Le traité de Ghadamez ne pouvait d’ailleurs être considéré que comme une première opération destinée à en préparer d’autres qui malheureusement furent négligées. La sécurité des trafiquans français étant garantie, la France aussitôt aurait dû avoir à Ghadamez un agent chargé spécialement d’en faciliter l’exécution. Il convenait de faire explorer la route nouvelle par des voyageurs chargés d’en dresser l’itinéraire. Dans ces conditions seulement, des négocians doués de quelque hardiesse auraient pu tenter un essai dont la réussite devait provoquer d’autres entreprises.

La guerre de 1870, suivie bientôt de l’insurrection de 1871 en Algérie, porta un coup funeste à notre influence dans le sud ; tout le pays était soulevé jusqu’à Biskra. Les gens de Tougourt ayant massacré leur garnison, il fallait à tout prix faire des exemples et rétablir la situation. Deux expéditions furent dirigées de ce côté à moins d’une année d’intervalle, la première par le général de Lacroix au-delà d’Ouargla, la seconde par le général de Galiffet sur El-Goléah. La première de ces expéditions a eu pour objet de ramener à l’obéissance ces régions éloignées qui avaient pris une part active à l’insurrection de 1871, et qui servaient de refuge à nombre de tribus rebelles. La seconde semble s’être proposé de compléter les résultats obtenus par la première, et peut-être aussi de faire réfléchir les populations du Gourara et du Touât, qui de tout temps ont prêté leur appui à nos adversaires musulmans. Ces deux expéditions ont parfaitement réussi, car les tribus remuantes de notre Sahara algérien ont fait leur soumission et demandé l’aman.

El-Goléah est le point extrême où soient parvenues nos armes dans le Sahara. Aujourd’hui dépouillée de son prestige lointain, l’oasis a vu percer le mystère derrière lequel elle s’enveloppait jusqu’à ce jour. Perchée sur un roc comme un nid de forbans, cette sentinelle avancée de la France dans le désert ne laisse pas, avec la demi-ceinture de palmiers clair-semés dans des enclos, que d’avoir assez bon air ; elle occupe une position très forte. Au nord se dressent, à 12 ou 15 kilomètres, plusieurs mamelons, dont deux paraissent très rapprochés. Au pied du rocher, vers le sud, les palmiers disséminés à intervalles inégaux donnent à cette partie du paysage l’aspect moucheté d’une peau de panthère. Partout ailleurs les aregs, mer rigide dont les vagues de sable, dorées par un soleil splendide, brillent d’un éclat éblouissant. El-Goléah est le point de jonction de la double ligne qui d’Ouargla et de Metlili conduit à ces oasis, et certes la présence d’une colonne française sur ce point rapproché a dû causer un vif émoi dans le groupe. Des envoyés touâtiens se sont