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le 6 juin un message du roi avait été adressé aux deux chambres avec le fameux sac vert (green bag) qui contenait le dossier de la commission. Ce dossier était recommandé à l’attention immédiate et sérieuse du parlement. « Le roi, disait le message, avait éprouvé le plus ardent désir de se soustraire à la nécessité de ces révélations et de ces débats aussi pénibles pour le pays que pour lui-même, mais la démarche de la reine ne lui laissait pas d’alternative. » Le lendemain, la chambre des communes devait délibérer sur une adresse en réponse au gracieux message de sa majesté. La langue parlementaire des Anglais veut que tout message de la couronne soit qualifié de la sorte, alors même qu’il s’agit des choses les plus disgracieuses. On allait donc répondre à ce gracieux message, quand M. Brougham se leva au nom de la reine et parla en ces termes :


« La reine croit nécessaire d’informer la chambre des communes qu’elle a été obligée de revenir en Angleterre par suite des mesures dirigées contre son honneur et son repos, mesures prises d’abord à l’étranger il y a un certain temps et sanctionnées récemment en Angleterre par la conduite du gouvernement. En adoptant cette résolution, la reine ne s’est proposé que deux choses : premièrement défendre son caractère, ensuite maintenir les justes droits à elle dévolus par la mort du monarque vénéré dont la haute estime et l’affection constante ont toujours été son appui le plus sûr.

« La reine, à son arrivée, est surprise d’apprendre qu’un message a été envoyé au parlement pour appeler son attention sur des documens écrits ; elle apprend avec un étonnement plus grand encore qu’on a l’intention de proposer le renvoi de ces documens à l’examen d’un comité secret. Il y a juste quatorze ans que les premières accusations de ce genre ont été dirigées contre sa majesté. Alors, et en toute occasion, elle a montré le plus grand empressement à voir ses accusateurs en face et à provoquer l’enquête la plus complète sur sa conduite. Aujourd’hui donc elle demande une investigation publique où elle puisse connaître et les accusations et les témoignages portés contre elle, — privilège qu’on ne refuse pas au dernier sujet du royaume.

« À la face du souverain, du parlement et du pays, la reine proteste solennellement contre la formation d’un tribunal secret chargé d’examiner des documens que ses adversaires ont secrètement préparés ; elle proteste contre cette procédure inconnue à la loi du pays, contre cette violation manifeste de tous les principes de la justice. Elle s’en remet avec pleine confiance à la loyauté, de la chambre des communes pour déjouer la seule tentative qu’elle ait quelque raison de redouter.

« La reine ne craint pas d’ajouter que, même avant de se décider à la poursuivre, on l’a traitée d’une manière trop bien calculée pour