Page:Revue des Deux Mondes - 1876 - tome 16.djvu/200

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avantages judiciaires, administratifs qu’on en peut retirer. Cette autorité a beaucoup faibli depuis cinq ans ; les choses en vont-elles mieux ? Il est des esprits préoccupés avant tout du côté politique des choses, qui ne semblent pas se douter que la perte du prestige, de l’autorité du maire dans les petites communes, c’est tout simplement l’inexécution des lois : c’est l’inertie du garde-champêtre, c’est l’hésitation et l’embarras de la gendarmerie. Tous ces agens inférieurs, qui rendent tant de services lorsqu’ils sont bien dirigés, ont besoin d’être soutenus, et si l’état ne les soutient pas, l’état est mal servi. Il faut cependant quitter le terrain étroit de la politique militante, descendre aussi des sphères éthérées de l’idéal, pour examiner ce qui se passerait vraisemblablement dans les 30,000 communes de France qui ne sont le siège ni d’une préfecture, ni d’une sous-préfecture, ni d’une justice de paix, ni d’un commissariat de police, ni d’une brigade de gendarmerie à si le système qu’on propose venait à prévaloir ; On n’aurait plus de maire ; on aurait un président du conseil municipal, une sorte de chef de pouvoir exécutif local toujours révocable à volonté, car un maire élu par le conseil ne pourrait se maintenir malgré lui ; ce serait le célèbre amendement Grévy appliqué dans chaque commune de France. Qu’arriverait, il alors ? Ou le maire tiendrait avant tout à conserver le pouvoir, et alors ayant besoin de telle ou telle voix pour se maintenir, il l’achèterait par mille complaisances ou mille compromissions, — ou bien, et c’est ce qui arriverait le plus souvent, tracassé, combattu, sans autorité, sans appui, il rejetterait avec empressement ces insignes de l’administration locale qui deviendraient pour lui un intolérable fardeau. C’est ce qui se produirait inévitablement, et c’est le symptôme qu’on observait déjà sous le régime de la loi de 1871. Ceux qui ont appartenu à l’administration à cette époque savent quels efforts il fallait faire pour raffermir les maires toujours prêts à se retirer et à quitter la partie.

Ce système nous paraît donc inadmissible, malgré les noms illustrés qui lui ont prêté leur éclatant patronage. Il ne pourrait pas vivre en France avec le régime du suffrage universel, et l’on n’en ferait pas l’expérience pendant plusieurs années sans amoindrir du haut en bas de l’échelle sociale. Un principe d’autorité nécessaire et déjà bien affaibli. Somme toute, les intérêts communaux sont toujours suffisamment sauvegardés, à défaut du maire, par un conseil municipal élu, sans parler des simples habitans qui se désintéressent souvent de la chose publique, mais jamais de la chose locale. Si les propriétés sont mal surveillées, si les rues sont mal éclairées, si les agens communaux ne font pas leur devoir, si les ressources communales sont gaspillées, il y a là des intéressés fort attentifs qui s’en aperçoivent et qui s’en plaignent. L’état, au contraire, n’a