Page:Revue des Deux Mondes - 1876 - tome 16.djvu/83

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LES
MARINS DU XVIe SIECLE

II.
CHANCELOR.[1]


I

Ni Sébastien Cabot ni le conseil privé d’Edouard VI ne paraissent avoir soupçonné l’immense extension qu’avait prise en 1553 la principauté de Moscou. L’ombre, du grand-khan s’interposait encore, plus d’un siècle après que le grand-khan lui-même avait disparu, entre la Russie d’Ivan IV et le regard troublé du pilote-major de Séville. Comme un continent longtemps submergé, la terre des Varègues et des Slaves renaissait lentement à la lumière du jour. Pendant près de deux cents ans, le flot de l’invasion n’avait cessé d’en bouleverser le sol, la couvrant, la quittant, la reprenant tour à tour. Quelle inondation se montra jamais plus tenace et marqua par de plus terribles vestiges chacun de ses assauts ? Dans les premières années du XIIIe siècle, nous apprennent les chroniques épouvantées du temps, « une immense nation, sortie des déserts qui s’étendent au-delà des limites extrêmes de la Chaldée, » apparut tout à coup sur les bords du Volga[2] : 60,000 éclaireurs la précédaient, souillant et dévastant tout sur leur passage, « horde de démons, dont les

  1. Voyez la Revue du 15 juin.
  2. Chronique de Mathieu Paris.