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ravissait les gens initiés aux difficultés du métier. Encore ne trouve-t-on rien de comparable à cette magnificence que les Chinois ont obtenue par l’imitation du porphyre, du jaspe sanguin, de l’obsidienne ou de la serpentine.

Toute la porcelaine employée aux usages communs est à fond blanc avec ornement bleu de cobalt. Cette couleur, choisie par un empereur, dit la légende, à cause de l’agréable reflet vert qu’elle donne au thé, est universellement adoptée. C’est dans la province d’Owari qu’on fabrique en quantités prodigieuses toute cette poterie vulgaire. C’est de là aussi que viennent les belles jardinières à fond gros bleu, à ornemens blancs en saillie, si prisées des indigènes pour leur pâte fine, leur émail uni et leur belle teinte. Kanga fabrique des petites tasses, des théières minuscules, des vases lagènes et des cuvettes ornées de dessins rouge et or d’une grande délicatesse. Inari produit des plats dont les décorations chimériques envahissent un fond d’un ton grisâtre, qui attiédit l’éclat des couleurs. Hizen envoie des plats à grands ramages, dont le fond disparaît complètement sous des teintes bleu de Prusse et rouge brique d’une épaisseur sensible au doigt et même à l’œil, des vases couverts de fleurs, d’oiseaux, de personnages, et aujourd’hui des services de table, copiés sur des modèles anglais, d’un mauvais goût lamentable. Nagasaki est le principal centre d’exportation de la porcelaine du Japon; il en a exporté en 1875 pour la somme de 280,000 francs. On fabrique encore, sous le nom de terre de Hizen, des théières d’argile brune couvertes par endroits d’un émail diversement coloré. C’est à Satzuma seulement que l’on trouvait jadis ces brûle-parfums ventrus et ces pitons d’une pâte tendre où des gerbes de fleurs, d’une adorable exécution, s’élancent sur un fond craquelé d’un blanc œuf d’autruche. Aujourd’hui le vieux satzuma est devenu introuvable; le nouveau est rare. C’est à Yeddo que se fabrique la majeure partie des maj cliques vendues sous ce nom, très inférieures aux anciennes comme fini et comme éclat. Enfin Kioto, la ville industrieuse par excellence, n’a pas de rivale dans l’art de marier et de calmer les couleurs sur un fond terre de Sienne.

Il ne faut chercher dans aucune de ces provinces, sauf à Owari, une grande manufacture rappelant Sèvres ou le fameux établissement chinois de King-te-tchin. Comme toutes les autres industries du Japon, celle-là est morcelée et s’exerce sur une petite échelle dans des fabriques multiples et restreintes. Si au penchant d’une colline vous voyez s’élever, sous une petite toiture inclinée, une série de huit ou dix compartimens en brique, étages les uns audessus des autres et communiquant entre eux, de telle sorte que, le feu étant allumé dans celui du bas, la flamme et la fumée puissent