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universelle, qu’elle ait pour cause leur résistance unanime et victorieuse contre les Arabes, les Goths ou même les Romains, un fait certain, c’est qu’elle est attestée par les documens les plus authentiques. « tous les naturels et habitans de ce señorio, dit le fuero, sont hidalgos notoires non-seulement en Vizcaye, mais au dehors, à la seule condition de prouver qu’ils sont fils de parens Vizcayens. » En même temps, le fuero interdit le territoire aux Mores et juifs même convertis, aux nègres, aux mulâtres, et ordonne que les étrangers qui voudront s’y établir soient tenus de fournir des preuves de « pureté de sang » dans l’espace de soixante jours. Des dispositions analogues veillaient en Guipuzcoa à ce que rien ne vînt corrompre ou altérer la limpieza de sangre, particulière aux fils du pays. Du reste, cette noblesse universelle des Basques n’entraînait point de degré ni de classification, c’était la noblesse inférieure, infanzonia, ne jouissant pas des prérogatives qui étaient au moyen âge le propre du riche-homme ou d’un chevalier des ordres militaires. Bien plus, si elle leur assurait encore de nombreux avantages vis-à-vis des autres habitans non nobles de la monarchie, entre eux elle ne leur en procurait aucun ; le privilège de la noblesse disparaissait par cela même qu’il était général. Enfin les juntes respectives de Vizcaye et de Guipuzcoa avaient grand soin de maintenir cette égalité toute démocratique en empêchant les personnages influens d’introduire dans les deux provinces des distinctions féodales, et maintenant encore elles n’admettent pas l’usage des titres de noblesse, qui, purement honorifiques, pourraient éveiller cependant une idée de suprématie. En Alava, la situation n’était plus la même, sans doute à cause du voisinage de la Castille, et la noblesse n’était pas le privilège de tous : au plus loin que l’on remonte, on y trouve des seigneurs particuliers avec leur cortège obligé de serfs et de vassaux. En revanche, les hidalgos de ce pays jouissaient d’une prééminence essentielle sur ceux des deux autres provinces sœurs ; c’est qu’outre les privilèges inhérens à la hidalguia en général, en 1332, Alphonse XI leur concéda le privilège principal et distinctif de la noblesse castillane, à savoir l’indemnité de 500 sous d’or pour blessure ou outrage fait à toute personne noble. Aussi, tandis que, pour faire preuve de noblesse en Vizcaye et en Guipuzcoa, il suffisait de prouver qu’on était né ou issu de parens nés sur le territoire de la province, en Alava, au contraire, il fallait prouver la noblesse de sang dans ses ascendans, conformément aux lois de Castille, car seule elle donnait droit à l’indemnité des 500 sous d’or. Il n’y a donc pas à confondre la noblesse particulière d’Alava, convertie en noblesse de sang par la concession d’Alphonse XI, avec celle de Vizcaye et de Guipuzcoa, noblesse de sol, générale, telle qu’on ne la connut nulle part ailleurs.