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développement des affaires, sans s’inquiéter des produite du trésor. Si la tarification était laissée à son libre arbitre, on pourrait presque affirmer que bientôt les dépenses excéderaient les recettes. C’est, à notre avis, un des plus grands dangers qui puissent résulter de l’exploitation par l’état. Car alors les produits des pays traversés par le chemin remis aux mains de l’état jouiraient d’un privilège qui serait refusé à toutes les autres parties du territoire, et cela aux dépens des deniers de l’état, c’est-à-dire de tous les contribuables. Les autres compagnies de chemins de fer qui n’auraient pas auprès d’elles le trésor public comme bailleur de fonds ne pourraient supporter une concurrence illégitime, ou se trouveraient bientôt ruinées si elles voulaient la soutenir pour l’approvisionnement du grand marché de la capitale, dans le cas où elles prétendraient y amener les voyageurs et les marchandises aux mêmes conditions que la ligne exploitée par l’état.

« D’un autre côté, si nous remettions la tarification à M. le ministre des finances, il serait à craindre que, trop uniquement préoccupé des recettes et des besoins du trésor, il ne s’arrêtât à des chiffres trop élevés qui entraveraient, sans nécessité, la circulation des voyageurs et des marchandises, et arrêteraient, au lieu de le développer, le mouvement du commerce et de l’industrie. »


Devant l’assemblée nationale, il y eut une discussion longue, approfondie, et, dans la séance du 21 avril 1849, M. Jules Favre présenta, sur la question générale de l’exploitation des chemins de fer par l’état, des observations de la plus haute importance et formula la critique la plus vive du système de l’exploitation par l’état. La loi cependant fut votée et promulguée le 25 avril 1849 ; mais elle n’accordait au ministre des travaux publics l’autorisation d’exploiter le chemin de fer de Versailles à Chartres que jusqu’à ce qu’il eût été statué définitivement sur la concession ou l’exploitation de la ligne totale de Paris à Rennes.

Au même moment, les ingénieurs de l’état achevaient les sections de Paris à Tonnerre et de Dijon à Châlon, et il était nécessaire d’en assurer la mise en exploitation. La loi du 1er mai 1849 y pourvut dans des termes identiques à ceux que nous venons de rappeler, c’est-à-dire jusqu’à ce qu’il eût été statué définitivement sur la concession ou l’exploitation entière du chemin. Le gouvernement avait eu un instant la pensée de proposer à titre définitif l’exploitation du chemin de fer de Paris à Lyon par l’état, et un projet dans ce sens avait été préparé à la fin de l’année 1848. Déposé devant l’assemblée nationale, il avait été retiré et remplacé, le 30 avril 1849, par un projet donnant à l’exploitation par l’état un caractère absolument provisoire.

L’exposé des motifs lu à la séance du 30 avril 1849 contenait ce