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sur les Pensées de Joubert c’était se donner le spectacle d’un écrin de diamans, » en avait présenté quelques échantillons à ses lecteurs, et M. Matthew Arnold en avait aussi inséré quelques extraits dans son Essay on criticism. Joubert n’était donc pas inconnu en Angleterre. Déjà, depuis la publication de M. Henry Attwell, des recueils littéraires ont appelé l’attention du public anglais sur Joubert et sur son traducteur.

Tous ceux qui sont familiers avec le style de Joubert comprendront aisément les difficultés que présentait une pareille tentative. M. Attwell reconnaît lui-même que, par la différence même des deux langues, certaines pensées, et nous pourrions dire des meilleures, sont restées rebelles à ses efforts, et qu’il a dû renoncer à les reproduire, et dans quelques-unes mêmes de celles qu’il a traduites, il reconnaît aussi, et il est facile de s’en convaincre, que sa langue n’a pu lui fournir des équivalens capables de répondre à la portée exacte des mots français. Mais enfin l’épreuve, quelle qu’en fût la difficulté, a été souvent surmontée de la manière la plus heureuse, et ce qui prouve que les pensées de Joubert, qui semblent puiser une partie de leur valeur dans l’exquise ciselure du style, ont cependant un fonds solide de vérité et de nouveauté qui les soutient, qui survit même dans une langue étrangère, c’est que la plupart d’entre elles conservent en anglais la plus grande partie de leur prix. Il n’a pas paru sans intérêt de signaler ici un fait qui prouve la sympathie qu’inspire en Angleterre notre littérature et l’estime accordée à un écrivain que la Revue a eu l’heureuse fortune, parmi tant d’autres révélations du même genre, de faire connaître la première à ses lecteurs.

L. DE RAYNAL.


Reise in der egyptischen Aequatorial-Prinz und in Kordofan von Ernst Marno. — Wien 1878. A. Hölder.


En 1874, le colonel Gordon, chargé par le khédive de continuer l’expédition d’abord confiée à sir Samuel Baker, avait fait demander à la Société de géographie de Vienne un naturaliste qui pût l’accompagner dans son voyage aux grands lacs. La Société fit choix pour cette mission de M. Ernest Marno, déjà connu par son exploration du Soudan, et M. Marno partit de Vienne le 13 octobre, muni de fonds suffisans, que la Société de géographie et le gouvernement autrichien avaient mis à sa disposition. Arrivé à Souakin le 31 octobre, il se rendit d’abord à Khartoum, d’où un petit bateau à vapeur le conduisit à Ladô, quartier-général de Gordon-pacha. Ladô, dans le district de fiari, sur la rive gauche du Bahr-el-Pjebel, a remplacé Ismaïlià (Gondokoro) comme station principale et siège du gouvernement de la province équatoriale, parce que Gondokoro est devenu inhabitable depuis que le cours du Bahr-el-Djebel s’est déplacé vers l’ouest. Le bras du fleuve qui baigne