Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 26.djvu/948

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

devait trouver l’Autriche moins facile à satisfaire, l’Allemagne moins complaisante et l’Angleterre plus énergique et plus résolue qu’on ne comptait.

Ce fut le gouvernement autrichien qui prit l’initiative de proposer une conférence entre les puissances européennes. Le 4 février, le jour même où il apprit la signature des préliminaires de paix et avant même d’en connaître le texte, il chargea par le télégraphe l’ambassadeur d’Autriche à Londres d’inviter le gouvernement anglais à une conférence à laquelle prendraient part toutes les puissances signataires des traités de 1856 et 1871. Le lendemain, le comte de Beust remettait à lord Derby une note officielle dans laquelle la position de l’Autriche se trouvait ainsi définie : « L’Autriche-Hongrie, en sa qualité de puissance signataire des actes internationaux qui ont eu pour objet de régler le système politique en Orient, a toujours réservé, en présence de la guerre actuelle, sa part d’influence sur le règlement définitif des conditions de la paix future. Le gouvernement impérial de Russie, auquel nous avons fait part de ce point de vue, l’a pleinement apprécié. » L’adhésion de l’Angleterre fut immédiate : celle des autres puissances fut également obtenue, mais des objections s’élevèrent contre le choix de Vienne comme lieu de la réunion des plénipotentiaires. Bade fut substitué à Vienne, et ne tarda pas à être remplacé par Berlin pour complaire à M. de Bismarck. Le chancelier allemand avait exprimé le désir qu’à la conférence entre de simples plénipotentiaires, obligés d’en référer pour le moindre détail à leur gouvernement, on substituât une réunion des ministres dirigeans, et que cette réunion eût lieu à Berlin. Ce changement dans la qualité des négociateurs avait pour conséquence de transformer la conférence en un congrès. M. de Bismarck acceptait de le présider, mais il laissait à l’Autriche le soin d’établir un accord entre les gouvernemens : il se réservait de ne convoquer le congrès qu’après que l’adhésion de toutes les puissances aurait été obtenue. Le cabinet de Vienne, par une note officielle du 7 mars, transforma donc sa proposition d’une conférence en une proposition pour la réunion d’un congrès. En acceptant officiellement cette proposition, le 9 mars, lord Derby aborda pour la première fois la question sur laquelle un accord s’est trouvé impossible à établir, à savoir le programme du congrès projeté. « Il est à désirer, écrivit-il au comte de Beust, qu’il soit bien entendu que toutes les questions débattues dans le traité de paix entre la Russie et la Turquie seront considérées comme devant être discutées dans le congrès, et qu’aucun changement dans l’état des choses précédemment établi par les traités ne peut être reconnu valide tant qu’il n’aura pas obtenu l’assentiment des puissances. » Voilà le point sur lequel le cabinet