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entraînent les terres des régions supérieures et n’y laissent que le roc nu. La Toscane, dont les chênes étaient autrefois si recherchés pour la marine et la fabrication du merrain, est presque dépeuplée et ne renferme plus que quelques taillis. Il semble cependant que le gouvernement se soit préoccupé de remédier à cette situation, car il a récemment proposé aux chambres, qui l’ont votée, une loi ayant pour objet de faire dresser par l’administration le tableau des forêts et des terrains dénudés qui, situés au-dessus de la zone des châtaigniers, doivent être assujettis à la servitude forestière; d’empêcher le défrichement des forêts et de reboiser aux frais de l’état ou des communes, même par voie d’expropriation, les terrains vagues qui se trouvent compris dans ce tableau. Il eût été bien plus facile d’empêcher la ruine des forêts pendant qu’elles existaient encore que de les reconstituer une fois qu’elles ne sont plus. Mais on n’apprécie l’importance des forêts que lorsqu’elles ont disparu, car il est dans la nature humaine de ne compter qu’avec le présent et de ne pas se préoccuper d’un mal lointain.

Si de la région méditerranéenne nous passons dans la région tempérée proprement dite, nous constatons que la flore n’y est pas uniforme, qu’elle est différente au nord et au midi, dans les plaines et dans les montagnes ; mais elle ne se modifie que d’une manière insensible, sans qu’on puisse établir de limites bien précises. Les arbres résineux, et particulièrement les plus à crochets et les mélèzes, sont ceux qui s’avancent le plus vers le nord et qui atteignent les plus hautes altitudes. Nous avons déjà dit que cette aptitude à supporter les climats les plus rigoureux tient à ce que, ne perdant jamais leurs feuilles, ils peuvent se contenter d’une période de végétation plus courte que les arbres dont la foliation annuelle exige un certain temps. Plus au sud, les essences feuillues, telles que le bouleau, le tilleul, le hêtre, le chêne, se mêlent aux résineux et finissent par rester les maîtresses exclusives du terrain.

Toute cette région n’était autrefois qu’une vaste forêt; mais la culture en a successivement défriché la plus grande partie. L’étendue de la surface boisée s’accroît à mesure qu’on s’avance vers le nord et vers l’est; ainsi, tandis qu’en France elle ne représente que 17 pour 100 de la surface totale du pays, en Allemagne elle est de 25 pour 100; dans les provinces d’Olonetz et de Vologda de 50 pour 100 et en Scandinavie de plus de 60 pour 100.

La Russie, qui a envoyé à l’exposition une très belle collection de bois, d’écorces et d’objets manufacturés, possède, abstraction faite de l’Asie, du Caucase et de la Finlande, 193,544,105 hectares de forêts ou 40 pour 100 de l’étendue totale de l’empire en Europe ; malheureusement ces forêts sont très inégalement distribuées, et tandis que dans les états du sud elles ne représentent