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Claude Bernard l’appelle aussi nerf frigorifique, en raison de l’abaissement de la température qui suit son action exagérée, et de l’accroissement qui suit la suppression ou la diminution de cette action.

Il semble que voilà dévoilés tous les secrets de l’innervation motrice des vaisseaux, et qu’il ne reste plus qu’à en appliquer les innombrables conséquences à l’interprétation du fonctionnement normal et pathologique de la vie. Il n’en est pas ainsi. Une fameuse expérience sur la glande sous-maxillaire a révélé à Claude Bernard une autre innervation vaso-motrice, qui semble l’opposée de la première. Sans donner ici les détails de cette expérience, je dirai que, en excitant un nerf, la corde du tympan, qui se rend à la glande sous-maxillaire, et qui n’appartient pas au système sympathique, Claude Bernard a déterminé, non pas la constriction de tous les vaisseaux sanguins de la glande, mais une dilatation active de tous ces vaisseaux, une suractivité circulatoire comparable à celle que détermine la section, la paralysie du sympathique. Il y a donc deux ordres de nerfs qui agissent sur les vaisseaux, les uns pour les resserrer, les autres pour les dilater; il y a des nerfs vaso-constricteurs, et des nerfs vaso-dilatateurs. Les premiers, provenant du système sympathique, seraient modérateurs de la circulation et de la température, nerfs frigorifiques; les seconds, excitateurs de la circulation, surtout dans les momens d’activité fonctionnelle de la partie, seraient des nerfs calorifiques. Cette innervation vaso-dilatrice est-elle générale ou limitée à certaines régions? Claude Bernard penchait pour la première opinion, et bien des dilatations vasculaires par action réflexe semblent lui donner raison ; mais, générale ou non, cette innervation existe, et son rôle est considérable.

Que de déductions physiologiques et médicales devaient sortir de la connaissance de l’innervation vaso-motrice! Et d’abord la notion désormais complète et scientifique des circulations locales. A la circulation générale ou harveyenne se joignent des circulations locales propres à chaque organe, de sorte que les mouvemens des liquides y sont, jusqu’à un certain point, indépendans de ceux qui s’accomplissent dans les organes voisins. Ces circulations locales ont même leurs dispositions anatomiques propres que Claude Bernard a bien montrées. Il y a, dans les vastes réseaux de la circulation capillaire, des capillaires destinés à servir d’intermédiaires entre les artères et les veines ; ce sont des dépendances de la circulation générale. Il y a, en outre, des réseaux spéciaux entés sur ces canaux de la circulation générale, se développant à côté d’eux, communiquant avec eux, mais cependant ne dépendant pas entièrement de la circulation générale, possédant au contraire une certaine indépendance, servant à la nutrition intime des tissus ou au fonctionnement