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une salle de dissection, qu’on ne se sert que du creuset, de la balance, du thermomètre, du scalpel et du microscope, qu’on ne recherche par l’analyse et l’expérience que les élémens et les conditions des phénomènes, n’est-on pas naturellement conduit à ne rien voir, rien comprendre, rien admettre au-delà, et à reléguer parmi les entités métaphysiques tout ce qui a reçu le nom de principes et de causes ? D’où vient la vie ? Selon le mode actuel de la génération, elle provient d’un germe apporté par un être vivant. C’est la loi de tous les êtres de forme saisissable, que nulle école de physiologie ne songe à contester. Mais cette loi est-elle absolue, et n’est-il pas possible de rencontrer des cas où cette génération se produit autrement ? L’école des physiologistes mécanistes a une tendance marquée à chercher les principes des êtres vivans dans leurs premiers élémens. Seulement une école de savans ne brave point l’expérience. Nos biologistes les plus confians dans les explications de l’ordre mécanique savent trop bien que nos chimistes les plus habiles et les plus heureux dans leurs synthèses ne font pas sortir de leur creuset des nerfs, des muscles et du sang. Ils n’en peuvent extraire que ce qu’on nomme, en chimie organique, des principes immédiats. Aussi n’a-t-on jamais songé à faire dériver directement la vie de ces élémens chimiques de la matière organisée ; mais on a pensé à la génération spontanée pour certaines espèces microscopiques. MM. Pouchet et Jolly ont attaché leurs noms à ce genre de recherches, et l’on a pu croire un instant, dans le monde savant, qu’ils avaient réussi. Leurs expériences tendaient à faire sortir des êtres vivans de matières purement inorganiques. Les mêmes expériences, reprises et refaites dans des conditions plus rigoureuses par un de nos premiers expérimentateurs, n’ont point confirmé ces résultats. En supprimant toute trace de germes organiques par une élévation de température, M. Pasteur a montré qu’aucune espèce d’être vivant ne sort d’une matière inorganique, et que la théorie des germes préexistant n’a reçu aucune atteinte des expériences qui avaient pour objet de constater une génération spontanée. « A mesure, dit-il, que nos moyens d’investigation se perfectionneront, on trouvera que les cas de génération qu’on regardait comme spontanée rentrent dans le cas de génération physiologique ordinaire. C’est ce qu’ont d’ailleurs démontré récemment les travaux de M. Balbiani et ceux de MM. Coste et Gerbe sur la génération des infusoires. » A défaut de faits concluans, l’école mécaniste n’en conserve pas moins la conception qui lui est chère et en cherche la confirmation, sinon dans le phénomène de la génération spontanée, du moins dans le mode de développement de l’être engendré. Dans la question spéciale des cellules organiques, M. Ch.