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— Peut-être... et dans ce cas... C’est peu vraisemblable cependant, à moins que... Oui, ce serait la seule hypothèse possible.

— Explique-toi.

— Ni en deux ans ni en cinquante cette façade n’a pu disparaître pierre à pierre. Ces murailles sont d’une épaisseur telle que l’action du temps sur elles ne peut qu’être lente. Si ta supposition est exacte, la façade a dû s’abattre tout entière, à la suite d’un tremblement de terre, ce qui est peu probable, car les secousses sont rares ici et n’auraient pas respecté les autres monumens, ou bien par l’effondrement d’une partie du monticule. S’il en est ainsi, cette muraille s’est affaissée sur le côté sud, et la forêt la recouvre en partie. Nous nous en assurerons dès demain, et, si tu ne te trompes pas, je crois pouvoir affirmer que le plan remis à Mercedes est celui du Palais du Nain. Reste, il est vrai, la ligne de points. Est-ce un sentier ? Il y a impossibilité matérielle. Cette partie de la forêt qui s’étend de la mer au Palais est un fouillis impénétrable. Les arbres y comptent des siècles d’existence, et rien n’indique qu’un chemin quelconque ait jamais relié ces deux points.

— Le curé Carillo n’a-t-il pas parlé d’une communication souterraine qui, suivant les Indiens, existerait entre la mer et les ruines ?

— Tu as raison, répondit Fernand. S’il ne se trompe pas, nous approchons de la solution. Tu as eu là deux idées excellentes.

— Sans doute parce que je ne les cherchais pas. Je courais après Itza, et c’est toi qui l’as ramenée. La vie est pleine de surprises, ajouta-t-il philosophiquement. Si, il y a un an, on m’avait prédit que je fouillerais pendant huit jours une forêt du Yucatan pour y trouver une Indienne et un chien roux, cela m’aurait étonné. Dona Carmen attendait les visiteurs sur la terrasse. Chaque jour elle épiait leur arrivée pour échanger avec eux quelques mots qui la tenaient au courant de ce qu’ils avaient fait ou découvert depuis la veille. Chaque jour le flegmatique George Willis répondait évasivement. Puis Fernand causait avec dona Mercedes, et Carmen, avec une nuance d’impatience nerveuse qu’exaspérait le calme de son compagnon, interrogeait George Willis, à qui elle arrachait par fragmens le récit détaillé de ses courses à la poursuite d’Itza et des recherches de son cousin dans les ruines.

A l’air satisfait de Fernand, elle conjectura qu’il avait quelque nouvelle à lui communiquer. Il ne s’arrêta qu’un instant auprès d’elle pour lui dire qu’elle ne se trompait pas et que George la mettrait au courant. Les laissant seuls, il rejoignit Mercedes assise sous le pavillon, un ouvrage à la main et qui l’accueillit avec un sourire de bienvenue. La jeune fille lui était reconnaissante de sa