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25 pour 100[1] ; c’est ce qu’il entendait par ces paroles qu’il prononçait le 10 mai 1826 : « Notre intention est de réduire le tarif le plus bas que comportent, sur chaque article, les deux objets légitimes de tous les droits de douane, les besoins du trésor public, et la protection nécessaire à l’industrie du pays[2]. » C’est également en prenant ce principe, ainsi entendu, pour règle de leurs prétentions, que les économistes français les plus rigides réclament la révision de notre tarif de douanes[3]. »

Enfin, pour ne rien omettre, qu’il soit permis d’ajouter que, si le principe du laissez passer admet aujourd’hui même en pure théorie des exceptions que les premiers économistes auraient peut-être contestées, le principe du laissez faire en admet encore davantage. On reconnaît aujourd’hui, d’un commun aveu, qu’il est bien des cas où l’intervention d’un gouvernement ne doit pas se borner à garantir un champ libre à l’activité individuelle ; où beaucoup de choses très utiles deviendraient impossibles sans son concours, voire même sans son initiative.

Le dernier ouvrage de M. Mill, exposé complet du dernier état de la science, et dont assurément l’autorité n’est pas suspecte, contient à ce sujet les considérations les plus élevées et les plus’ sages[4].

Il suit de là qu’en se maintenant sur le terrain des principes, sur les hauteurs de la théorie, on ne voit pas bien en quoi désormais les doctrines professées par les protectionnistes diffèrent précisément des doctrines professées par leurs adversaires ; on ne voit pas bien ce que les premiers pourraient légitimement demander qui leur pût être légitimement refusé par les seconds.

Du moment où les protectionnistes renoncent à demander protection pour toute industrie quelconque, par cela seul qu’elle existe ou qu’elle peut exister ; du moment ou ils consentent à prendre l’intérêt général, l’intérêt bien entendu des consommateurs, pour arbitre entre eux et les consommateurs ; du moment, en revanche, où leurs adversaires admettent que toute industrie dont le maintien importe à la sécurité publique doit être protégée coûte que coûte, que toute industrie grevée d’impôts doit être protégée dans la proportion de l’impôt qu’elle supporte ; que toute industrie qui promet de soutenir, un jour, la libre concurrence, doit être protégée dans une juste mesure durant sa minorité ; qu’enfin les représailles contre l’étranger sont permises, en matière commerciale,

  1. Acte du 5 juillet 1825.
  2. Parliamentary Debates, new series, t. XV, p. 1180.
  3. Michel Chevalier, Exam. du syst, commerc., p, 293-313.
  4. Elements of polit, econ. by John Stuart Mill, t. II, book V ch.. XI.