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suivre sur ce terrain. Il y aurait là de quoi m’effaroucher, si je n’avais autant à cœur la solution d’un problème auquel j’ai consacré le meilleur de mes veilles. Le ministre de la marine italienne met au concours l’étude de la tactique navale des anciens ; du programme posé résulte dès l’abord une œuvre remarquable :

Est-ce un affront pour toi ? Compose, écris, fais mieux !


Faire mieux ! ce n’est, en vérité, pas facile. Gil Blas, mon ami, préviens-moi, quand tu t’apercevras que je baisse. M. le contre-amiral Luigi Fincati est un maître ; en quelques lignes, il a su exposer les difficultés du sujet et les résoudre, sinon d’une façon pour moi tout à fait satisfaisante, d’une façon du moins qui me semble aussi ingénieuse que nouvelle.

Prêtons toute notre attention à l’éminent amiral : « Les vaisseaux de guerre de la Méditerranée, nous dit-il, jusqu’à la moitié du XVIe siècle ne différèrent pas des vaisseaux des anciens, si ce n’est dans quelques parties accessoires. La forme, le tonnage, l’armement, l’appareil des rames, furent les mêmes à bord des trirèmes vénitiennes ou génoises et à bord des trières d’Athènes, de Syracuse et de Rome. Aussi les ordres de bataille et les procédés de combat des marins italiens du moyen âge reproduisent-ils exactement ceux que nous décrivent Thucydide, Polybe, Tite Live et autres auteurs. On en trouvera la preuve dans divers ouvrages, notamment dans les Historie del mio tempo de Natal Conti, dans la Nautica mediterranea de Bartolommeo Crescenzio, dans les Dialogues de Cristoforo da Canale ; mais celui qu’il faut, avant tout, consulter à ce sujet, c’est le savant capitaine Pantero Pantera, qui, dans son Armata navale, corrobore à chaque pas ses prescriptions d’exemples tirés des batailles navales des anciens. De Salamine à Lépante, durant une période de près de vingt siècles, les vaisseaux de guerre par excellence furent toujours les trirèmes. Les dimensions de ces navires ne varièrent pas sensiblement ; on retrouve constamment le vaisseau à rames tel que l’a minutieusement décrit Cristoforo da Canale : long de 120 pieds, large de 16, avec 6 pieds de creux. Deux armatures latérales sont destinées à soutenir les rames. Au-dessus de ces armatures se dressent les pavois verticaux qui protègent les rameurs, pavois que nous voyons porter successivement les noms de talamii, de talari, d’ali et de morti. Deux cents hommes, combattans et rameurs, composaient l’équipage. La proue était munie d’un réduit de combat qu’au moyen âge on appelait rambade, — rambata, — et que les anciens nommaient catastromata. La chiourme comprenait cent cinquante rameurs placés trois à trois sur