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sujet, nous étions contraires à l’idée d’une reconstitution de l’ancien empire et favorables à celle d’une confédération.

Ce projet ne manquerait pas de rencontrer des adversaires dans les partis les plus divers et même dans les camps les plus hostiles les uns aux autres ; on ne pouvait se faire aucune illusion à cet égard. Il fallait combattre maint appétit de conquête, restreindre le champ de plus d’un intérêt particulier ; nous en étions convaincus. Toutes les considérations de ce genre furent subordonnées par nous au but que poursuivait l’empereur François : ce but, on le sait, était d’assurer à l’Europe et à son propre empire les bienfaits de la paix politique pour une suite d’années aussi longue que possible. On ne saurait discuter avec l’esprit de parti sur un tel projet ; aussi ne le fîmes-nous pas entrer en ligne de compte.

Après la bataille de Lützen, le roi de Saxe, effrayé de la menace que lui avait faite Napoléon de le déclarer déchu de son trône, avait annulé son alliance avec l’Autriche et avait quitté Prague pour revenir à Dresde. Si cette démarche, qui peut s’expliquer par la situation de la Saxe, a coûté au roi la moitié de son royaume, l’autre moitié doit l’avantage de s’être maintenue comme état indépendant à ce même prince, qui se distinguait par de rares qualités comme souverain, mais que la fortune avait durement éprouvé. D’ailleurs il n’aurait jamais appartenu qu’à l’Autriche d’élever une plainte contre son parjure.

Après la campagne de 1812, dont l’issue fut si funeste pour Napoléon et pour ses alliés, le roi de Bavière fit des ouvertures à l’Autriche pour s’entendre avec elle. Nous acceptâmes ces avances, à cause des renforts que ce nouvel allié amènerait à nos armées dans le cas où l’on continuerait la guerre ; nous y voyions aussi un acheminement vers l’établissement de la confédération germanique, qui rentrait dans nos plans.

Après l’avortement du congrès de Prague, les souverains de l’Autriche, de la Russie et de la Prusse se réunirent, avec leurs chefs de cabinet, à Teplitz, où le feld-maréchal prince de Schwarzenberg avait établi son quartier-général. La tâche qui s’imposait aux cabinets réunis était d’arrêter et d’assurer autant que possible les bases de la quadruple alliance, et de tracer la marche à suivre pour les opérations militaires. Pour nous, nous désignions les trois points ci-dessus comme base et en même temps comme condition sine qua non de l’entrée de l’Autriche dans l’alliance. De plus, pour assurer, dans les limites du possible, le succès de nos armes, nous demandions la réunion des troupes des trois puissances continentales sous le commandement en chef du feld-maréchal prince de Schwarzenberg, et la division des opérations militaires en campagnes déterminées.