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capitaux garantis ne représentent plus la valeur exacte des frais de premier établissement. En second lieu, le ministère ne traite jamais qu’avec un concessionnaire du pays. Celui-ci, chargé de former la compagnie à laquelle il rétrocède ses droits, vend le plus cher possible son privilège ; le prix de vente n’entre pas dans l’estimation des dépenses, et si le capital garanti devient insuffisant, rien n’indique que le gouvernement doive accorder par la suite un intérêt aux sommes complémentaires. En troisième lieu, le terme des concessions a été réduit de quatre-vingt-dix à trente ans, et pourtant le premier terme n’a pas permis aux sociétés qui en ont été favorisées, d’assurer à leurs actionnaires les 7 pour 100 de dividende promis, ni de conserver à leurs actions la valeur nominale. Enfin l’encombrement du marché par un trop grand nombre d’affaires du même genre et la compétence donnée, en cas de litige, aux tribunaux brésiliens, effraie les plus aventureux. Le baron de Penedo accompagne ces observations spéciales de considérations générales. L’augmentation des dettes publiques, les faillites et même les banqueroutes de beaucoup de petits états ont effrayé les capitalistes de la Grande-Bretagne et leur ont fait préférer les valeurs anglaises, dont les intérêts sont sûrs, s’ils sont peu élevés, aux valeurs étrangères à gros rendemens. Il touche, en passant, un point délicat : l’emprunt contracté à Londres, en 1875, par le gouvernement brésilien n’avait été autorisé par le parlement que pour le développement du réseau. Néanmoins l’opinion publique est convaincue, en Angleterre, que cet emprunt a été détourné de son affectation et que le produit en a été employé à solder des dépenses militaires, à éteindre une portion de la dette flottante et à combler en partie le déficit du budget. « Si nous voulons attirer les capitaux anglais, ajoute le ministre, apprêtons-nous à offrir des titres simples, assurés, exempts de toute aventure, d’incertitudes sur le coût de la ligne, et donnant au moins 6 pour 100 d’intérêt par an. Que le crédit de l’état garantisse directement ces titres et que les agens des finances brésiliennes en paient directement les intérêts à Londres. Et même en agissant ainsi rencontrerons-nous de grandes difficultés, tant la défaveur est générale. »

Le secrétaire d’état qui eut à prendre, à Rio, une décision sur ces questions si graves, n’était déjà plus celui qui s’était adressé au baron de Penedo. En 1878, les libéraux remplacèrent les conservateurs au pouvoir, et M. Ioâo Linz Vieira Cansacâo de Sinimbu, ami personnel de l’empereur, chargé de composer un nouveau cabinet, s’était réservé le département des travaux publics avec la présidence du conseil. Dans son premier rapport aux chambres, le nouveau ministre exprima son opinion sur les renseignemens reçus de Londres. Selon lui, la manière dont avait été exécutée la