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les moins pressées attendent alors que les cours soient revenus aux taux ordinaires. La solution du problème des encombremens consiste dans la variation des prix, entraînant, comme conséquence, l’établissement de magasins dans toutes les localités où des affluences exceptionnelles de marchandises peuvent se produire, car les navires et les wagons ne doivent jamais en tenir lieu.»

L’influence de l’offre et de la demande peut se faire sentir sous des formes qui, au premier abord, paraissent bizarres. La houille de Blanzy arrive à Nantes faire concurrence aux charbons anglais. Cette houille est grevée des frais d’un transport énorme effectué par bateaux. Pour être transportée du lieu de production jusqu’à Nantes, elle passe par Tours. Or, le prix est le même à Tours qu’à Nantes; il a même, à une certaine époque, été plus élevé à Tours. La raison en est simple : c’est que le prix de la houille, dans la basse Loire, a pour régulateur le prix des charbons anglais, et que les charbons anglais sont plus chers à Tours qu’à Nantes. Personne ne songe à se plaindre de cette anomalie parce qu’il s’agit d’une industrie libre. Mais dès que ce même fait se produit dans un tarif de chemin de fer, il soulève des tempêtes de réclamations. On s’indigne que le prix soit le même de Bordeaux à Redon que d’Angoulême à Redon, bien que la marchandise parcoure 132 kilomètres de plus pour le premier trajet, sans prendre en considération que les prix de transport par chemin de fer entre Bordeaux et Redon sont limités par la concurrence du cabotage, et qu’il n’en est pas de même entre Angoulême et Redon. Si on suivait les habitudes anglaises, le transport d’Angoulême à Redon coûterait plus cher que de Bordeaux à Redon, à cause de la concurrence du cabotage.

Cependant le sentiment public s’est tellement insurgé que l’administration a dû lui faire une concession ; c’est ce qu’on appelle la clause des stations non dénommées, qui est applicable à tous les tarifs spéciaux et qui est ainsi libellée :

« Les marchandises de ou pour une station non dénommée comprise entre deux stations dénommées, jouiront du bénéfice des taxes inscrites au présent tarif spécial, en payant pour la distance entière depuis la station dénommée, située avant le lieu du départ, jusqu’à la première station dénommée située après le lieu de destination. »

Cela semble de toute justice, et pourtant il est bien des cas où ce principe est radicalement faux, et on a le droit de dire que ce n’est « qu’un expédient propre à diminuer la vivacité des réclamations. »

On lit, dans une brochure imprimée par les soins du ministère des travaux publics, en septembre 1877 :