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elles s’accusent davantage et atteignent 0m, 020 par mètre; de Figeac à Arvant, elles augmentent encore et atteignent 0m, 030 par mètre. La même machine qui part de Paris en traînant 880 tonnes est obligée d’en laisser 180 à Orléans et ne peut plus en tirer que 700 au-delà de ce point; arrivée à Limoges, il lui faut en laisser 260 et elle ne peut en remorquer que 440 jusqu’à Nexon ; arrivée à Nexon, elle est obligée d’en laisser 240, et elle ne peut plus en traîner que 200 jusqu’à Figeac. Enfin, à Figeac, il faut encore qu’elle s’allège de 70 tonnes : elle ne peut plus en remorquer que 130. Ainsi, partie de Paris avec 880 tonnes, elle arrive à Arvant avec 130. Voilà des frais de traction singulièrement augmentés, et le prix de revient s’en ressent naturellement. C’est donc une grosse erreur que de se préoccuper uniquement de la distance pour l’établissement des prix de revient.

Dans le document que nous avons déjà cité, on laisse dans l’ombre cette considération si grave, lorsqu’il s’agit de comparer le prix de transport de Coutras à Nantes, par Tours, à celui de Contras à Nantes, par La Rochelle et La Roche-sur-Yon, alors que, dans la seconde direction, les pentes sont trois fois plus raides que dans la première. Attribuer uniquement la différence de tarif a une pensée de concurrence déloyale, c’est laisser ignorer un des points les plus graves de la question.

Il est facile de prouver que, lorsqu’il s’agit de transport, la ligne droite n’est pas toujours le plus court chemin d’un point à un autre : les trois villes de Brives, Limoges et Périgueux forment les trois sommets d’un triangle dont chaque côté est une ligne de chemin de fer; sur la carte, ces trois côtés sont sensiblement égaux; les trois lignes appartiennent à la compagnie d’Orléans, il n’y a donc aucune concurrence à faire intervenir. Il paraît donc bien certain que les marchandises de Brives pour Limoges suivront directement la ligne qui réunit ces deux villes. Eh bien, il n’en est rien, et toutes les marchandises de Brives pour Limoges passent par Périgueux, parcourant ainsi une distance double. C’est que, entre Brive et Limoges, on rencontre des pentes très raides qui obligent à réduire la charge des locomotives, et telle machine qui remorque trente wagons pleins, entre Brives, Périgueux et Limoges, n’en traînerait que douze entre Brives et Limoges. Au point de vue du prix de revient, il y a donc moins loin de Brives à Limoges en passant par Périgueux qu’en y allant directement : nouvel exemple de bouleversement des conditions naturelles, résultant des distances et de la situation topographique.

Citons encore une considération qui influe sur le prix de revient : Paris est un grand consommateur, il absorbe les matières premières