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UNE
CONSPIRATION ROYALISTE
A STRASBOURG, EN 1792,
D’APRES DES DOCUMENS INEDITS.

Les correspondances ont, en général, sur les mémoires ce grand avantage de n’avoir pas été composées pour le public et préparées pour l’effet. Les correspondances politiques particulièrement peuvent être regardées comme l’échange net et précis d’idées entre des gens tout occupés de l’heure et de l’action présente ; aussi sont-elles pour l’histoire l’un des plus précieux élémens d’information.

Le hasard, ce complaisant des chercheurs, nous a permis d’avoir communication de lettres inédites échangées, de 1791 à 1794, entre les chefs de l’émigration. Ces documens originaux, restés inconnus pendant quatre-vingt-cinq ans, furent légués, avec d’autres papiers, par le maréchal de France, marquis de Vioménil, à une personne de sa famille, de qui nous les tenons. Ils servent de pièces justificatives à ses Mémoires politiques et militaires, volumineux manuscrits également inédits, remplis des renseignemens les plus détaillés, des révélations les plus piquantes sur ce qui s’est passé hors de France, entre Français, de 1789 à 1816.

En dehors de leur intérêt pour l’histoire générale, ces mémoires ont un attrait très vif en ce qu’ils mettent en un singulier relief la personnalité du maréchal, tout à fait inconnue de notre génération. M. de Vioménil fut cependant, de l’aveu de ses contemporains, l’un des hommes de guerre les plus expérimentés, l’un des politiques les plus sagaces de son temps. Mal servi par la fortune, condamné à user de grands talens sur un petit théâtre et dans une guerre