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des publications économiques, l’obligation pour les banques de rendre des comptes annuels et de les soumettre à l’examen d’inspecteurs ou auditors nommés par les actionnaires.

En définitive, les banques anglaises pourront toutes désormais, celles déjà établies comme celles qui seront établies plus tard, adopter un régime qui se rapprochera beaucoup de celui des sociétés anonymes en France. Les banques françaises possèdent aussi, en fait sinon en droit, un capital de réserve, car la plupart d’entre elles ont pour règle de n’exiger que le versement du quart ou de la moitié du capital souscrit. La principale différence avec la nouvelle législation des banques anglaises consiste en ce que, pour celles-ci, le capital réservé ne peut être appelé avant la liquidation. Ce capital constitue un véritable cautionnement au profit des créanciers sociaux. Cédant à l’influence des administrateurs des grandes banques de Londres, le gouvernement avait d’abord divisé les banques en deux catégories : les banques à capital réservé, les banques à capital limité. Mais il a renoncé, avec raison, à cette distinction. La nouvelle loi a été votée sans difficulté, mais non sans débats. Pendant deux séances consécutives, sir Stafford Northcote a tenu tête, avec une rare présence d’esprit, à toutes les objections, faisant les concessions nécessaires, repoussant les amendemens inutiles, mais résolu à obtenir le vote qui a eu lieu sans division dans la nuit du 15 août. Aussitôt que le vote final a été proclamé, la session a été close : « Je vous donne rendez-vous sur les moors pour chasser aux grouse, » s’est écrié gaîment le chancelier de l’échiquier.

L’opinion publique a fait bon accueil à cette réforme. On a objecté, il est vrai, que la nouvelle loi n’avait rien d’obligatoire. L’objection est sans portée pour une loi anglaise. Nulle part le principe de la non-rétroactivité des lois n’est aussi rigoureusement respecté qu’en Angleterre. Les lois précédentes de 1826, 1833, 1858, 1862 n’avaient non plus rien d’obligatoire. Elles n’en ont pas moins profondément modifié, avec le temps, la condition des banques anglaises. De 1862 à 1877, il a été enregistré dans le Royaume-Uni douze mille cinq cent quatre-vingt-dix sociétés par actions. Dans ce nombre les sociétés à responsabilité solidaire ne figurent que pour quatre cent quatre-vingts, parmi lesquelles cent soixante-dix-neuf étaient antérieures à la loi de 1862. La loi ne dispose que pour l’avenir. Au surplus, la plupart des banques solidaires se sont hâtées de profiter des stipulations de la nouvelle législation et de renoncer à la responsabilité solidaire.

Dans une des dernières séances de la chambre des communes, le chancelier de l’échiquier a reconnu que la nouvelle loi avait reçu le meilleur accueil et que la moitié des banques à responsabilité