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LA
LETTRE DU PAPE
A
L’ARCHEVÊQUE DE COLOGNE

Le pape Léon XIII a écrit dernièrement à l’archevêque de Cologne une lettre qui a causé en Allemagne une vive sensation; cette lettre est tout un événement. Après de longues hésitations le souverain pontife vient de s’imposer un dur et pénible sacrifice pour rétablir en Prusse la paix religieuse. Dans la grande partie qui se jouait, depuis 1872, entre le Vatican et le prince de Bismarck, c’est le prince de Bismarck qui a gagné la première manche; il peut s’applaudir de son succès. Après avoir fait sentir à l’église catholique toute la vigueur de son poignet et la pesanteur de son bras, après avoir frappé de grands coups, qui pourtant ne semblaient pas décisifs, il en a attendu patiemment les effets. Il n’a pas attendu en vain, sa patience a été récompensée, sa clairvoyance n’a point été mise en défaut, ses prédictions se sont accomplies. Dès le 16 avril 1875, il avait dit à la chambre des députés de Prusse : « L’histoire nous montre des papes guerroyans et des papes débonnaires. J’ose espérer que nous verrons un jour sur le trône pontifical un homme pacifique, qui, renonçant à revendiquer la domination universelle pour l’élu du clergé italien, sera disposé à laisser chacun vivre à sa façon et avec lequel nous pourrons conclure un traité de paix. » Ce pape pacifique s’est rencontré; il vient de faire à M. de Bismarck une importante concession, qui rend un accord possible. Qu’obtiendra-t-il en retour? Selon toute apparence il ne le sait pas encore. Il a affaire à un homme qui dans les marchés qu’il conclut a l’habitude de donner peu pour recevoir beaucoup. Il n’en est pas