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conclure dans un pays civilisé. A supposer que ces 300 millions fissent en effet un vide dans la circulation, ce vide serait bientôt et avantageusement comblé par les billets des banques. Ici se place la seconde observation que nous nous permettrons d’adresser à M. Magliani. Il entoure les banques italiennes des soins d’une tendresse inquiète et quelque1 peu oppressive. Il redoute pour leurs billets la concurrence du papier d’état : il leur continue plus longtemps que de raison le cours forcé sous le déguisement du cours légal ; enfin, il se préoccupe de diminuer d’une centaine de millions l’importance de leurs émissions actuelles. Le principal avantage qu’il aperçoive au remboursement de 44 millions à faire à la Banque nationale, ce n’est pas de fortifier l’encaisse de cette banque et de lui donner la faculté d’étendre sans péril son émission, c’est au contraire de lui permettre de retirer de ses billets pour une valeur correspondante. Est-ce ainsi que M. Magliani compte acclimater en Italie la monnaie fiduciaire ?

La situation des banques italiennes est excellente, puisque, d’après les tableaux publiés par le ministre, elles possèdent toutes une encaisse égale à 33 ou 35 pour 100 de leur émission. Il leur est loisible de fortifier encore cette situation en aliénant les rentes publiques, les fonds provinciaux et communaux et les valeurs diverses qu’elles ont acquises pour donner un emploi aux capitaux inactifs. La suppression du cours forcé et la disparition de la plus grande partie dut papier de l’état auront pour conséquence inévitable d’accroître l’importance des espèces métalliques qui leur seront versées. Enfin, la liberté qui va leur être rendue de modifier le taux de l’escompte, sans avoir besoin de l’approbation préalable du gouvernement, leur permettrait de défendre leur encaisse, comme le font les banques de tous les pays, en mettant un prix plus élevé à leur concours. Il nous paraît incontestable que, si le papier de l’état disparaissait complètement et si le commerce et l’industrie n’avaient plus pour le règlement des opérations de quelque importance d’autre instrument que les billets des banques italiennes, celles-ci pourraient, sans inconvénient et sans péril, élever leur émission du chiffre actuel de 750 millions à 1 milliard.

Ces critiques de détail ne retirent rien de son mérite au projet de M. Magliani. Il faut louer sans réserve l’esprit d’initiative et la résolution dont le ministre a fait preuve, les études consciencieuses auxquelles il s’est livré et la lumière qu’il a su répandre sur ce grave sujet. Nous nous permettrons même d’adresser au parlement italien le conseil d’en terminer promptement avec cette question, puisque le gouvernement le met en demeure de prendre un parti, lorsque des problèmes aussi graves pour l’avenir d’un