Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 43.djvu/648

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de mise en valeur est remarquable, en ce sens qu’il fournit aux populations ce dont elles ont le plus besoin et le leur fournit à bref délai. Les populations des Hautes-Alpes sont essentiellement pastorales ; ce qu’il leur faut, ce sont des ressources pour l’alimentation des troupeaux ; elles les trouvent dans les périmètres, soit par les herbes qui seront fauchées, soit par la feuille des frênes et des ormeaux plantés sur les banquettes ; de plus, les acacias donneront bientôt des bois qu’on emploiera dans la culture de la vigne.

« Par le fait de la consolidation du sol et de la végétation, les caractères torrentiels, si bien décrits par M. Surell, ont disparu ; Les eaux, même en temps de pluie, sont moins troubles ; elles sont meilleures pour l’arrosage… En arrivant sur les cônes de déjection, elles ne sont plus chargées de matières et s Rencaissent naturellement dans leurs dépôts. En enlevant et en transportant plus loin les menus matériaux, elles mettent à découvert les pierres d’un gros volume et se constituent un lit solide et fixe. Les divagations sont moins à redouter et moins dangereuses, et à peu de frais les riverains peuvent se défendre.

« Mais il importe de citer des exemples et des chiffres. À Sainte-Marthe, on avait étudié, en 1861-1862, un projet de construction sur le cône de déjection. Cette digue, évaluée à 40,000 francs environ, avait pour but de préserver la route impériale no 94 et les propriétés riveraines contre les envahissemens du torrent. Ces travaux n’étaient en réalité qu’un remède provisoire ; la digue eût été, au bout de quelques années, ensevelie sous les déjections. Aujourd’hui, le torrent de Sainte-Marthe est complètement éteint : il ne descend rien de la montagne. Les propriétaires et les ingénieurs ne songent plus à des digues ; de simples murs de clôture suffisent pour protéger les terres riveraines.

« Le torrent de Pals, commune de Rizoul, traverse la route no 4 et la route impériale no 94. En 1865, j’ai fait étudier le projet des travaux à faire pour endiguer ce torrent, en fixer le lit et le conduire directement au Guil, en évitant la route impériale no 94 : c’était une dépense de 25,000 francs au moins. Depuis cette époque, le bassin de réception a été régénéré et consolidé ; le torrent s’est éteint, le déplacement du lit est devenu inutile, on s’est borné à construire sur la route un aqueduc pour le passage des eaux ; un ouvrage de 1,000 francs a suffi là où l’on prévoyait une dépense de plus de 25,000 francs.

« Le torrent de Rioubourdoux, près de Savines, avait une violence excessive ; il charriait beaucoup de matériaux, et l’établissement d’un pont pour le passage de la route impériale no 94 était