Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 43.djvu/685

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les point voir se renouveler. Rien ne se passait effectivement comme il se fût cru des droits secrets à l’espérer. Le général Galvez venait d’être rappelé subitement du Yucatan à Mexico, parce qu’on le soupçonnait de vouloir se prononcer. Campêche, où l’on avait eu l’imprudence de laisser rentrer tous les individus dangereux que le commandant Cloué en avait bannis, s’agitait de nouveau. On avait introduit l’ennemi dans la place. L’ancien gouverneur Pablo Garcia, tous les membres de son gouvernement, tous ses partisans les plus exaltés y étaient revenus. Ils travaillaient la ville, dont tout le bas peuple était dévoué à Pablo Garcia, qui était, à ce qu’il paraît, estimé du reste de la population et digne de l’être. Le Tabasco, grâce à l’impunité dont on l’avait laissé jouir, s’était organisé de manière à servir de refuge à Juarès si celui-ci, dans un temps donné, ne pouvait plus tenir au nord. S’il manœuvrait bien, c’est au Tabasco qu’il se rendrait pour prolonger la guerre indéfiniment et être insaisissable.

Le pays est si coupé d’arroyos qu’un partisan habile s’y soustrait toujours à ceux qui le poursuivent. Ce qu’il y avait de bizarre, c’est que, le blocus étant levé, Juarès pouvait parfaitement se rendre avec un bâtiment neutre sur n’importe quel point du littoral et que nous n’avions aucun droit de le saisir tant qu’il serait à l’abri d’un pavillon étranger. Il pouvait donc à son gré choisir l’heure ou le lieu, mais on inclinait à croire qu’il débarquerait plutôt entre Alvarado, à cause des ressources que lui offrait le Tabasco, et la lagune de Terminos. À ce dernier endroit, le Brandon continuait à garder Carmen et à sauvegarder Palizada et Jonuta. A la Frontera, nous touchions toujours les droits de douane sans faire autrement la guerre aux libéraux et sans qu’ils nous la fissent. Le nouveau capitaine de la Tourmente croyait même à un compromis possible. C’est que, par suite d’une divergence d’opinions et surtout d’intérêts dont la cause occulte et déjà signalée par nous était à Mexico, tous les chefs de Tabasco n’étaient pas d’accord. Il y en avait qui penchaient pour un accommodement, non avec l’empire, mais avec la France. Toutefois ils ne s’enhardissaient à aucune proposition sérieuse et » ne trahissaient la cause générale et libérale de leur pays que par quelques manifestations sans portée. Dans la province de Vera-Cruz, non contens d’exploiter par bandes la route d’Orizaba et les alentours, de piller les diligences et de maltraiter les voyageurs, les libéraux s’étaient proposé un mouvement révolutionnaire pour le 16 septembre 1865, anniversaire de l’indépendance. Le commandant Cloué était venu de Sacrificios avec le Magellan, quarante soldats européens du fort avaient été envoyés à la garnison et les compagnies de débarquement s’étaient tenues prêtes toute la journée à sauter à terre avec trois pièces d’artillerie. Il