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l’eau, son charbon, de l’acide carbonique. Un litre de grisou exige pour se brûler deux litres d’oxygène ; le tout se transforme en un litre d’acide carbonique et en deux litres de vapeur d’eau ; c’est dire que le volume ne devrait pas changer. Cependant il augmente considérablement au moment même de la combustion, parce que les gaz qui étaient froids sont tout à coup portés à l’incandescence ; mais il diminue aussitôt, parce qu’ils se refroidissent, que la vapeur d’eau se condense et qu’il ne reste qu’un litre d’acide carbonique. En résumé, il y a tout d’abord une grande dilatation et une grande pression par l’augmentation de la température, et aussitôt après une grande contraction par le refroidissement.

Ce genre de combustion, qui n’offre aucun danger, ne se fait pas dans les mines ; mais il y en a un autre qui est redoutable. Quand les deux gaz sont mélangés à l’avance et qu’on introduit au milieu d’eux une lampe allumée, on ne voit rien de particulier tant que la proportion du grisou dans l’air ne dépasse pas 3 ou 4 centièmes. Si elle augmente, on en est averti par le régime de la flamme, qui fume et s’allonge, ce qui prouve une difficulté de combustion, et qui s’entoure d’une auréole violacée, ce qui indique une tendance du gaz à s’enflammer lui-même autour d’elle ; on dit alors que la lampe marque. A mesure que le mélange s’enrichit, la flamme tend à s’éteindre et l’auréole à s’étendre. De 10 à 14 centièmes, la première s’annule, et tout le mélange s’enflamme à la fois avec une brusque détonation. Au-delà de ce terme, flamme et auréole disparaissent, parce qu’il n’y a plus assez d’oxygène pour les entretenir. Il est facile de se rendre compte de ces effets. A la température ordinaire, l’air et le grisou resteraient éternellement en présence sans exercer aucune action réciproque ; mais vient-on à échauffer par une allumette un des points du mélange jusqu’à 700 degrés, aussitôt il prend feu en cet endroit. Ce feu échauffe les parties voisines jusqu’au degré qui leur est nécessaire pour qu’elles brûlent à leur tour, pour qu’elles continuent le même rôle autour d’elles et que la déflagration se propage en rayonnant de proche en proche. Elle se transmet avec une rapidité si grande que l’effet semble instantané ; alors la masse entière se dilate à la fois par la chaleur et les enveloppes sont projetées et brisées comme par la poudre.

L’expérience se fait habituellement avec un petit flacon dans lequel est enfermé le mélange ; on l’enveloppe d’un linge épais et mouillé et, le tenant d’une main, on le débouche avec l’autre en approchant l’orifice de la flamme d’une bougie. Aussitôt l’explosion se produit, et on ne retrouve du flacon que des débris. Remplacez par la pensée le flacon par une galerie de mine, supposez qu’on y apporte une lampe ou une simple allumette, aussitôt le feu prend, se transmet rapidement et, l’ouragan enflammé, courant jusqu’aux