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deviennent plus rares et les victimes moins nombreuses : il y a donc un évident progrès.

Il faut savoir que les ouvriers des mines sont exposés à toute sorte de dangers : ils descendaient autrefois par des échelles verticales ou par des systèmes oscillans qui exigeaient une grande attention de leur part ; les chutes étaient fréquentes, et c’était la mort. Aujourd’hui les profondeurs sont devenues si grandes qu’on est obligé de les descendre mécaniquement dans des bennes ; mais les dangers du voyage n’ont point encore disparu. Arrivé au chantier, le mineur, par la nature de son travail, est obligé de prendre les positions les moins commodes pour abattre au pic des masses de houille sous lesquelles il est à demi couché. Qu’un éboulement survienne, il est écrasé : cela arrive de temps à autre ; quelquefois un seul homme, quelquefois des escouades entières restent ensevelis quand une masse considérable s’écroule. Enfin des accidens nombreux de plusieurs sortes, qui attendent le travailleur au fond et à la sortie du puits, complètent les misères de son rude métier. Eh bien ! quand on décompose la statistique en chapitres séparés, ce n’est pas le grisou qui a été le plus fatal. Les chutes dans le puits sont presque aussi meurtrières, et les éboulemens font deux fois autant de victimes que lui seul ; enfin si on réunit toutes ces causes étrangères, elles sont trois fois plus à craindre que le grisou. Celui-ci n’a donc moyennement à sa charge, malgré sa sinistre réputation, que le quart des accidens. Je transcris ici un abrégé des tableaux de M. Dickinson ; les deux colonnes verticales de chiffres sont relatives aux périodes écoulées de 1851 à 1860 et de 1861 à 1870 ; elles sont les moyennes de dix années, elles indiquent le nombre des personnes sur lesquelles il y a eu une victime annuelle.


1851-1860 1861-1870
Moyenne générale 245 300
Par éboulement 653 767
Par explosion 1,008 1,408
Dans les puits 1,161 2,121
Accidens au fond 2,074 1, 666
Accidens au jour 4,872 4,119

Dans la première décade, il y eut 1 victime sur 245 personnes, dans la deuxième 1 sur 300 : c’est un notable progrès. Même amélioration pour les éboulemens, mais surtout pour le grisou, qui prit 1 personne sur 1,000 dans la première décade et seulement 1 sur 1,400 dans la seconde. Ces chiures sont consolans et pleins d’espérance.