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renouvelé. A vrai dire, cette chambre, qui s’achemine chaque Jour vers sa On, dont les heures sont plus que jamais comptées, elle aura touché à bien des problèmes d’organisation publique, et le malheur est que dans tout ce qu’elle aura fait elle aura porté justement cet esprit qui se manifeste moins par une politique suivie que par des velléités, par des fantaisies, par des impatiences de changement. Elle a remué bien des questions sans les résoudre, pour les laisser en suspens au moment de sa prochaine et définitive séparation. Certes ce ne sont ni les projets officiels, ni les propositions individuelles qui manquent à l’heure qu’il est ; ils sont de toute sorte, et à part le budget qui doit toujours être voté, qui est déjà à peu près adopté au Palais-Bourbon, propositions et projets n’ont plus même la chance d’arriver à l’épreuve décisive du scrutin. Les lois militaires n’auraient pas sans doute laissé d’être urgentes, ne fut-ce que pour épargner à M. le ministre de la guerre l’inconvénient de se mettre assez souvent en dehors de toute régularité ; elles sont désormais forcément ajournées a un autre temps, à un autre parlement. La loi sur l’enseignement obligatoire a été, il est vrai, votée par la chambre des députés ; mais elle est arrêtée au sénat, où elle est en train de subir d’assez sérieuses modifications. Chose étonnante ! M. Jules Simon a réussi à faire introduire dans l’enseignement primaire l’obligation d’instruire les jeunes enfans sur leurs « devoirs envers Dieu et envers la patrie. » C’est visiblement un attentat contre la « laïcité ! » Il est maintenant bien peu probable que la loi ainsi amendée soit acceptée par l’autre chambre avant la fin de la session. Ni ce projet, ni bien d’autres qui occupent encore des commissions parlementaires, qui touchent à toute sorte d’intérêts moraux ou matériels, n’ont plus le lumps d’être discutés et sanctionnés. Ils restent comme le témoignage d’une activité plus ambitieuse et plus remuante que réellement féconde.

Eh bien ! Dira-t-on, ce n’est point un mal que des questions qui ont après tout leur importance, qui intéressent le pays, soient soulevées par l’initiative parlementaire, dussent-elles n’être pas résolues pour le moment. Elles auront du moins été examinées, approfondies, et cette étude aura peut-être préparé une solution. Non, sans doute, ce n’est point un mal qu’on travaille dans un parlement, qu’on propose des innovations, des réformes. Le seul inconvénient, c’est qu’on risque assez souvent de se perdre dans la confusion, de tout ébranler, de meure pour ainsi dire en suspens ou en suspicion les lois anciennes sans réussir à les remplacer par des lois nouvelles. On se donne beaucoup de mouvement pour finir par ne rien faire, et un des plus récens exemples de ce travail sans résultat, c’est ce qui vient de se passer avec cette proposition aussi inutile que tardive faite par le gouvernement lui-même au sujet d’une organisation nouvelle de la préfecture de police.

La situation, à la vérité, devenait singulière. Voilà quelques mois