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Ce que désiraient à cette époque les intéressés, c’était de voir à la baie des Iles un sloop de guerre avec un vigoureux capitaine disposant d’une centaine de marins, un aviso pour surveiller les côtes et en particulier les stations de baleiniers, une police capable de débarrasser Kororarika des malfaiteurs. L’administration coloniale, par ses actes, ne donna satisfaction à personne, et plus d’un en prit occasion de maudire le département ministériel, qui était toujours prêt à donner l’exemple d’une déplorable incurie. Des instructions avaient été envoyées au gouverneur de la Nouvelle-Galles du Sud; alors on vît, le 17 mai 1833, descendre d’un vaisseau de la marine royale l’aimable homme que les navigateurs nous ont fait connaître, M. James Busby.

On le qualifiait de résident britannique à la Nouvelle-Zélande; il se disait consul près des missionnaires. Les officiers du navire lui faisaient cortège, les indigènes lui souhaitèrent la bienvenue en exécutant la danse dont ils ont coutume d’offrir le spectacle également en signe de paix et en signe d’hostilité. Personne ne parvenait à découvrir le rôle utile d’un agent sans fonctions précises, la mauvaise humeur fut générale. Le résident devint l’objet des plaisanteries des Européens et des aborigènes; ces derniers le déclaraient un homme de guerre sans fusil. Certes, M. Busby n’apportait pas les moyens de réprimer les crimes, mais, seul, il semblait tenir le drapeau de la Grande-Bretagne et représenter la souveraineté de l’Angleterre. Selon toute apparence, l’administration coloniale, assez indifférente aux désordres dont Kororarika était le théâtre, s’inquiétait de la tribu de Marion et ne songeait guère qu’à empêcher la France de tenter une colonisation sur un point quelconque de la Nouvelle-Zélande. Le résident jouissait d’un beau traitement servi par l’administration de la Nouvelle-Galles du Sud et d’une somme destinée à faire des présens aux chefs indigènes. N’ayant nul pouvoir, nulle force à sa disposition, nulle autorité, il n’avait point à compter avec des devoirs impérieux. Ignorant de la langue des Maoris, des mœurs et des coutumes de ce peuple, répugnant à la fréquentation des Européens, même de ceux qu’on disait honorables, il choisit pour son installation un endroit isolé, à certaine distance des indigènes et des commerçans ses compatriotes. M. Busby pensait sans doute vivre tranquille, obéir à ses inclinations suivant le mobile de son esprit. Cette conduite inspira du mécontentement aux Européens; aux Néo-Zélandais, de l’indifférence d’abord, ensuite une réelle malveillance, au moins chez ceux qui habitaient les environs, le district de Waïtangi. Il y avait une année que le résident était à son poste lorsque, la nuit, un chef du nom de Reti vint attaquer et piller la maisonnette occupée par les