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chambre syndicale, autrement dit du parquet tout entier, qui est collectivement solidaire. On espère que la liquidation aboutira à un concordat entre la corporation des agens de change et ses créanciers. Pour réunir les ressources nécessaires à l’exécution des engagemens que comportera ce concordat, on étudie un projet d’emprunt pour lequel l’appui du gouvernement paraît acquis. La Banque de France a promis de venir en aide à la place de Lyon, au moyen d’une avance de 100 millions contre garanties spéciales. Quant à la position de la coulisse à Paris, on ne saurait encore rien préjuger. Ce qui est certain, c’est qu’elle aurait sombré à la fin du mois, si l’Union générale avait maintenu pour le 3 février la liquidation de toutes les opérations faites à rémission sur les actions nouvelles. Cette émission a dû être ajournée; mais ce qui sauvera peut-être la coulisse perd l’Union.

Cet établissement, au début de la crise, a cru devoir soutenir par des achats à la Bourse le cours de ses titres. Il y était sollicité par la crainte qu’un succès même éphémère des vendeurs ne compromit toute l’opération de l’augmentation de son capital. Or l’Union, depuis la création des actions nouvelles, en avait vendu en quantité considérable sur le marché libre de Paris, à des prix variant de 1,500 à 2,000 fr. La coulisse doit, de ce chef, à l’Union, une somme évaluée à 110 millions environ. C’était en vue de soutenir les prix des actions nouvelles et d’assurer ainsi la solvabilité de la coulisse à son égard, que l’Union n’avait pas hésité à prendre au parquet entre 2,500 et 2,700 tout ce qu’offraient les vendeurs en actions anciennes. Il fallut bien cependant arrêter ces achats, et c’est aussitôt après l’arrêt que les offres tombant dans le vide, l’action de l’Union a été précipitée de 2,400 à 1,300.

Aujourd’hui l’Union doit au parquet 55 millions, dit-on, et elle a contre la coulisse une créance, irrécouvrable en fait, momentanément au moins, de 110 millions. Dans cette situation, le conseil d’administration a cru devoir demander au tribunal la nomination d’un administrateur judiciaire, qui a été désigné aussitôt et qui entre dès aujourd’hui en fonctions. Dans l’intervalle, l’action, sur laquelle toutes opérations à terme ont été virtuellement suspendues, a reculé de 1,300 fr. aux environs du pair.

Mais la coulisse, même débarrassée pour un temps de cette dette de 110 millions, court encore de grands périls, car elle est engagée à la hausse dans des proportions considérables sur des valeurs comme le Rio Tinto, la Banque ottomane, la Société minière et métallurgique, qui ont baissé de 200 francs. Des banquiers se sont bien engagés, assure-t-on, non-seulement à reporter, mais encore à racheter pour leur compte 10 pour 100 des valeurs reportées. Il est impossible de savoir si ces palliatifs préviendront les sinistres redoutés. La coulisse n’a pas d’existence légale; elle compte un grand nombre de maisons honorables, riches, mais elle ne peut s’unir, elle ne peut, comme le parquet, s’adresser