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les grandes compagnies du service des lignes nouvelles qui étaient voisines de leur réseau, d’après un système de régie intéressée, qui fixait un maximum de dépenses à la charge de l’état et la participation éventuelle des compagnies aux excédens de recettes, en réservant au ministre des travaux publics la pleine autorité sur le taux des tarifs. Plusieurs traités ont été conclus dans ces conditions pour un certain nombre de lignes au fur et à mesure de leur achèvement, mais ils doivent prendre fin le 30 juin 1882. On ne pouvait en effet attribuer à ces conventions qu’un caractère provisoire et une durée très limitée, et l’on supposait que, dans le courant de 1882, le gouvernement et les chambres se seraient entendus sur un système définitif d’exploitation. Nous touchons au terme, rien n’est fait, et il est probable que le provisoire devra être prorogé.

Il était nécessaire de retracer l’historique des phases successives par lesquelles a passé depuis six ans la question des chemins de fer et de montrer comment, après tant d’études et de programmes, il n’y a pas encore de décision. S’il est équitable de tenir compte des difficultés et des circonstances, ou ne saurait méconnaître que le gouvernement et le parlement ont à supporter une large part de responsabilité. Le simple exposé des faits, des sacrifices imposés au trésor public par des rachats onéreux, des combinaisons coûteuses auxquelles il a fallu avoir recours soit pour la construction, soit pour l’exploitation des nouvelles lignes, des discussions stériles qui n’ont abouti qu’à des expédiens, ce simple exposé suffit pour justifier bien des critiques et pour affaiblir singulièrement la première impression produite par le plan de M. de Freycinet. Ce n’est point qu’il y ait à regretter les travaux entrepris pour l’extension du réseau : le classement proposé en vue de déterminer les lignes d’intérêt général était nécessaire pour prévenir les empiétemens et pour ainsi dire les usurpations des lignes d’intérêt local que la fausse application des lois de 1865 et de 1871 tendait à multiplier d’une manière tout à fait désordonnée ; ce même classement était utile, en tant qu’avant-projet, pour répartir entre les diverses régions du territoire, selon les besoins appréciés ou prévus, les nouvelles voies de transport ; il n’impliquait pas une exécution immédiate ni simultanée, de telle sorte que si, à tel moment, la dépense venait à excéder les ressources du budget et du crédit, les travaux pouvaient être ralentis ou ajournés. Sans refuser aux esprits sceptiques la satisfaction de considérer le plan de M. de Freycinet, au moment où il a été lancé, comme une espèce de feu d’artifice tiré à la gloire de la république et envoyant à tous les points de l’horizon d’éblouissantes fusées, on doit admettre que l’auteur du plan était complètement dans son rôle de ministre des travaux publics et d’ingénieur