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l’Angleterre et l’Irlande. Il déclara qu’une semblable mesure équivaudrait à un véritable démembrement du royaume et que, par conséquent, il la combattrait jusqu’à la mort. Déclaration inutile, puisque le rappel n’avait pas la moindre chance d’être votée par les chambres ; déclaration imprudente, puisqu’O’Connell faisait campagne en faveur du rappel et que le ministère avait besoin de ménager O’Connell. Quel besoin d’ailleurs, en politique, d’employer les mots : Toujours, jamais, pour la vie, jusqu’à la mort ? Ils ont rarement porté bonheur à ceux qui s’en sont servis. Stanley ne réussît qu’à se rendre jusqu’à la mort impopulaire en Irlande. Dès les premiers jours de la session de 1833, il fut attaqué avec la dernière violence par O’Connell. Il se défendit comme il savait le faire. Le succès oratoire ne lui fit pas défaut ; mais il eut la mortification de se voir à peine soutenu par le parti libéral et même par le ministère dans lequel il siégeait. Il ne trouva de bienveillance que du côté des conservateurs. Robert Peel le couvrit de fleurs. Il n’en devint que plus antipathique aux libéraux avancés.

Le cabinet whig se trouvait donc dans cette bizarre situation que son vice-roi d’Irlande et son secrétaire pour les affaires irlandaises étaient tous les deux brouillés avec le chef du parti libéral en Irlande. Il fallait pourtant essayer de résoudre, avec ou sans l’appui d’O’Connell, les questions pendantes. Dès la première quinzaine de février, deux projets de lois furent déposés presque simultanément, l’un dans la chambre des lords, par lord Grey, chef du cabinet, l’autre dans la chambre des communes, par lord Althorp, ministre des finances. Le premier, le bill de coercition, répondait au besoin de faire cesser les désordres matériels en Irlande : il établissait des pénalités exceptionnelles et, pour les appliquer, des tribunaux d’exception. Il ressemblait à toutes les lois du même genre. Inutile par conséquent de l’analyser en détail. Le bill d’Althorp abordait la délicate question des dîmes. Le ministre proposait deux réformes principales : 1° rétablissement d’un impôt de 5 à 15 pour 100 sur tous les bénéfices de plus de 200 livres sterling, ce qui devait produire une recette de 60,000 livres ; 2° la suppression de 10 sièges épiscopaux sur 22, ce qui devait réaliser une économie également de 60,000 livres. Le produit de l’impôt devait être employé à des réparations ou constructions d’églises et de presbytères. Les 60,000 livres provenant de la suppression des sièges épiscopaux étaient à la disposition du parlement pour être employées suivant les décisions qu’il prendrait ultérieurement.

Pour tout esprit clairvoyant cette dernière disposition était la plus importante du bill. Elle posait, en effet, ce principe que les revenus affectés à l’église anglicane d’Irlande pouvaient, par une décision des pouvoirs publics, recevoir une autre affectation, c’est-à-dire