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que se borne la diminution de la population urbaine pour tous les départemens de France.

En revanche, beaucoup de départemens ont perdu des habitans des campagnes. Ce sont encore les départemens de la Normandie et du Haut-Languedoc qui présentent les plus forts amoindrissemens.

Le dernier recensement donne un éclatant exemple de cette émigration des campagnes vers les villes et en particulier vers Paris. De 1876 à 1881, la population totale de la France s’est accrue de 389,673. Or, si l’on retranche de ce chiffre le chiffre des habitans qu’a gagnés le département de la Seine, il se trouve que la France entière, moins Paris, n’a gagné en cinq ans que 52,649 habitans. Ce chiffre est moindre que l’augmentation des deux départemens des Bouches-du-Rhône et du Rhône (56,783). Il en résulte que, sans les trois grandes villes de France, Paris, Lyon et Marseille, la France aurait vu, depuis cinq ans, sa population diminuer. De fait, il y a eu une émigration incessante des campagnes vers les grands centres : il s’est fait un dépeuplement des campagnes, et la statistique de 1881 nous en donne la démonstration irréfutable.

Ainsi la statistique nous prouve que la population rurale est portée fatalement à émigrer vers les grandes villes et à abandonner les travaux agricoles.

Il est à peine besoin d’insister sur l’importance de ce fait au point de vue de l’accroissement de la population française dans son ensemble. Les habitans des villes ont moins d’enfans que les habitans des campagnes. Dans presque toutes les grandes villes de France, il s’établit un équilibre entre les décès et les naissances tel que les naissances ne l’emportent presque pas sur les décès, et cependant, dans les villes, les conditions sont extrêmement favorables pour qu’il existe une forte natalité. A Paris, par exemple, alors que la population d’adultes est si considérable, alors que les enfans nouveau-nés sont envoyés dans les départemens voisins pour y mourir, hélas ! en si grand nombre ; à Paris, dis-je, l’excédent des naissances est un peu inférieur, par rapport à la population, à ce qu’il est dans la France entière, et cependant les conditions sont telles qu’il faudrait, pour établir l’égalité entre la fécondité de Paris et celle du reste de la ’France, que Paris eût un excédent de naissances au moins trois fois plus grand.

La situation est la même pour les autres grandes villes de France, qui toutes, sauf quelques centres industriels, Lille, Reims, Amiens, présentent un très faible excédent des naissances. Cependant leur population comprend plus d’adultes et plus d’individus mariés, d’une part ; d’autre part, moins d’enfans que dans les