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menaçante, lorsque tout s’est compliqué récemment par une sorte de coup de théâtre, par l’intervention imprévue d’un homme qui a été mêlé à toutes les révolutions de l’Espagne, le maréchal Serrano en personne. Après avoir été le chef de l’insurrection de 1868, président d’un gouvernement provisoire, régent, candidat à tous les genres de pouvoir, le maréchal Serrano semblait être rentré dans la retraite. Il n’était pas un ennemi pour la monarchie restaurée; il a, au contraire, dans ces dernières années, fait publiquement adhésion à la royauté d’Alphonse XII. Il n’était pas non plus un ami très décidé. Il faisait peu parler de lui et paraissait rester volontiers en dehors de la politique active. Depuis peu de temps, cédant sans doute aux conseils ambitieux de son entourage, il a rompu le silence; il a fait des manifestes et des programmes. Il a déclaré la guerre au ministère Sagasta, qu’il ne trouve pas assez libéral, qu’il menace de son opposition. Ce qu’il voudrait probablement, ce serait commencer par contraindre M. Sagasta à se séparer du général Martinez Campos, dans lequel il voit un ennemi. La crise une fois décidée, il serait naturellement candidat désigné à la présidence du conseil dans un nouveau ministère.

La campagne est visiblement engagée pour être continuée devant les chambres ou au palais du souverain. Qu’en sortira-t-il? A vrai dire, le maréchal Serrano n’a jamais été une forte tête, et il n’a plus, comme au beau temps de ses succès, l’éclat de la jeunesse pour briguer tous les rôles. Qu’a-t-il d’ailleurs à offrir? Il en est réduit à promettre ou à réclamer, pour le premier article de son programme, le rétablissement de la constitution de 1869, de cette constitution démocratique avec laquelle le roi Amédée lui-même n’a pu vivre. Si c’est avec cette promesse et ces perspectives que le maréchal Serrano espère gagner l’esprit du roi Alphonse XII, il pourrait se tromper dans ses calculs, et le plus curieux serait qu’après avoir prêté son nom pour aider au renversement de M. Sagasta, il ne réussît en fin de compte qu’à préparer le retour au pouvoir de M. Canovas del Castillo et des conservateurs, qui seuls aujourd’hui peuvent recueillir les fruits de cette singulière campagne.


CH. DE MAZADE.


LE MOUVEMENT FINANCIER DE LA QUINZAINE

Le marché financier n’a pas salué par un mouvement général de hausse le rapide et brillant succès obtenu par les Anglais en Égypte. Il y a quinze jours, le 5 pour 100 était à 116.45. Non-seulement le