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et, de l’autre, les endroits habités se trouvent dans des baies abritées où la vraie force du vent est difficilement connue, d’où l’on ne peut, par conséquent, obtenir des renseignemens très exacts. C’est ce qui arrive, par exemple, pour les stations de Valentia et de Greencastle. Il serait aussi fort utile d’avoir des postes avancés à Saint-Kilda, la plus occidentale des Hébrides, et aux îles Féroë, situées au nord de l’Ecosse, car un grand nombre de tempêtes, et des plus désastreuses, arrivent de la partie nord de l’Atlantique en passant sur ces lies ; mais l’importance commerciale d’une communication télégraphique avec ces rochers étant à peu près nulle, il n’est guère probable qu’on se décide à l’établir dans un intérêt scientifique. Et pourtant les avis que pourraient envoyer ces stations avancées seraient plus précieux, à en croire M. Scott, que ceux que procurerait une communication télégraphique avec les Açores, plus précieux même que les télégrammes reçus des États-Unis. Les avis que le Bureau météorologique de Londres a reçus, pendant assez longtemps, de la station de Heart’s-Content (Terre-Neuve) n’ont pu être utilisés pour deux raisons : d’abord parce que cette station est trop abritée des vents du large ; ensuite, parce que les tempêtes qui traversent quelquefois l’Atlantique d’une rive à l’autre changent de caractère en route, se transforment et même se perdent complètement. « Quand les tempêtes du continent américain passent sur l’Atlantique, dit M. Loomis, elles subissent généralement d’importans changemens dans l’espace de quelques jours et sont souvent comme absorbées par d’autres tempêtes qui paraissent naître sur l’Océan, de sorte qu’on peut rarement les suivre dans tout leur trajet. » M. Scott cite, à ce propos, le coup de vent qui, le 30 novembre 1874, fit sombrer le bateau à vapeur la Plata près des îles de la Manche ; cette tempête s’éteignit ensuite complètement et disparut avant d’avoir traversé la mer du Nord.

Nous savons que le plus souvent les bourrasques suivent le fil du grand courant que M. de Tastes appelle le gulfstream aérien, courant dont le lit éprouve une lente oscillation qui tantôt le rapproche de nous en le ramenant au sud, tantôt le relève vers les hautes latitudes ; il semble aussi qu’une branche dérivée va rejoindre un large courant circumpolaire. On a eu la pensée d’utiliser cette disposition des courans aériens pour des prévisions à huit ou dix jours d’intervalle. Depuis quelques années, l’administration du New-York Herald expédie à Londres et à Paris des avis annonçant l’arrivée de tempêtes. Ces avis ne se justifient qu’aux époques où le régime des basses pressions est établi dans nos régions ; quand ce sont les hautes pressions qui dominent, les perturbations venues d’Amérique sont refoulées vers le nord et n’atteignent pas nos côtes. En étudiant l’Atlas de l’Observatoire de Paris et les cartes plus