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C’est du moins ce que semble prouver le très curieux parallélisme que l’on observe entre le développement des civilisations du vieux monde et celui des grandes nations du nouveau. C’est ce que confirment les analogies que l’on retrouve « entre les monumens, les inscriptions, les armes, les outils, les coutumes elles-mêmes des anciens Égyptiens, des Assyriens, des Étrusques, des Ibères » et ceux des peuples les plus anciens de l’Amérique, C’est ce qu’achève de démontrer l’étroite conformité du type de l’homme américain avec le type de l’homme de l’ancien continent. Nous avons d’ailleurs assez dit, il y a deux ans, à l’occasion de son excellent livre sur les Premiers Hommes et les Temps préhistoriques, quelle était la rigueur de méthode de M. de Nadaillac, et sa prudence, pour que l’on enveloppe de toutes les restrictions que l’état de la science commande ce qu’il peut y avoir, non pas précisément dans ses conclusions, mais au moins dans le sec résumé que nous en donnons, de trop affirmatif et de trop absolu.

Le voyage de M. Blunt et de lady Blunt[1] au « berceau de la race arabe » est aussi bien curieux à lire, et je ne doute pas qu’il ne profite en ce moment du surcroît d’intérêt qui s’attache aux choses d’Orient. Comme le fait remarquer le traducteur, M. Derôme, dans la savante préface qu’il a mise en tête de l’ouvrage, il y a un Orient que nous connaissons, que nous croyons du moins connaître, l’Orient turc, et un Orient que nous ignorons, l’Orient nomade, l’Orient proprement arabe, l’Orient sémitique. Or c’est cet Orient que nos deux voyageurs ont visité sinon pour la première fois, du moins dans des conditions telles qu’aucun Européen ne l’avait encore visité, non pas même Palgrave. Aussi est-ce avec le récit de Palgrave sous les yeux, — une Année de voyage dans l’Arabie centrale, — qu’il conviendra de lire le récit de lady Blunt. L’auteur lui-même, au surplus, tout en rendant hommage à l’œuvre de Palgrave, a pris la peine de marquer ce que son récit y ajoutait de véritablement nouveau.

Les quatre volumes que voici maintenant nous ramènent en Europe, ce qui ne veut pas toujours dire, — et deux au moins d’entre eux eu sont la preuve, — en pays plus connu.

M. Victor Tissot[2] est un guide toujours agréable, qui sait voir, qui sait faire voir, étonnant pour la quantité d’anecdotes qu’il glane chemin faisant et dont le tort n’est que d’être quelquefois trop caractéristiques, d’ailleurs depuis longtemps passé maître dans l’art de soutenir jusqu’au bout une attention qu’il sait éveiller dès les premières pages. Une bonne carte permet de suivre pas à pas l’itinéraire du voyageur. De fort belles héliogravures et de nombreuses gravures

  1. Voyage en Arabie, pèlerinage au Nedjed, traduit de l’anglais par M. Derôme, contenant une carte et soixante gravures sur bois, 1 vol. in-8o ; Hachette.
  2. La Hongrie. De l’Adriatique au Danube, par M. Victor Tissot, 1 vol. in-8o, ouvrage illustré de 10 héliogravures et de 160 gravures dans le texte ; Plon.