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en couleur en devient plus clair. Cette opération provoque une double décomposition : l’acide sulfurique du sulfate de chaux s’empare de la potasse des divers sels dissous dans le moût, et il se forme du sulfate de potasse, qui est un sel purgatif. Aussi le garde des sceaux, par une circulaire adressée aux procureurs-généraux au mois d’août 1880, déclare, falsifiés les vins qui contiennent plus de 2 grammes de sulfate de potasse par litre. L’acide salicylique est aujourd’hui fort employé. C’est un poison dangereux, mais il a l’avantage d’arrêter le développement des parasites microscopiques qui causent les maladies du vin. Il paraît aussi que l’emploi de l’acide salicylique permet de frauder l’octroi d’une manière fort ingénieuse : cet acide arrête momentanément la fermentation. « D’habiles industriels, dit l’auteur du rapport sur les travaux du laboratoire municipal, sucrent des vins déjà vinés à la limite de 15 degrés ; ils les salicylent,.. et entrent ainsi, à la barbe des employés du fisc, de l’alcool sous forme d’eau sucrée ; quinze jours après, le ferment reprend ses droits, la richesse alcoolique du vin passe de 15 à 20 ou 25 degrés produisant un vin concentré, capable de supporter sans qu’il y paraisse un mouillage de 50 pour 100 d’eau et plus. Les bénéfices doivent être fort beaux, à en juger par le nombre et l’ardeur des défenseurs du salicylage. » On a recours aux matières colorantes quand on a appauvri l’apparence du vin, en y ajoutant de l’eau. Le bois de campêche, la mauve, le sureau, la cochenille, l’oseille et surtout la fuchsine viennent au secours des cabaretiers. De toutes ces substances, la fuchsine est la plus dangereuse, non par elle-même, mais à cause de l’arsenic, dont elle est presque toujours accompagnée. Nous ne pouvons exposer ici tous les moyens très sûrs et très précis dont la chimie dispose pour découvrir les colorations étrangères. Le premier est bien simple ; on laisse tomber une goutte de vin sur un bâton de craie albuminée. La tache du vin naturel possède une couleur particulière qui n’a pas pu être contrefaite. La tache rosé de la fuchsine la dénonce au premier coup d’œil.

Enfin nous devons dire quelques mots de la plus fréquente des falsifications et de celle à laquelle les commerçais parisiens paraissent tenir le plus : le mouillage.

Il serait fort simple, pour dénoncer le mouillage, de comparer la quantité d’eau à la Quantité d’alcool. Mais les commerçans ont prévu le danger ; et après l’eau, ils rajoutent de l’alcool. C’est ce qu’ils appellent le vinage. Alors intervient un troisième élément, l’extrait sec. Le vin est évaporé à une température de 100 degrés. Il laisse un dépôt de matières minérales et organiques. Ce dépôt est très faible, on le conçoit, lorsque le vin a été mouillé et viné. Les