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des sujets traités, elles sont d’ailleurs de nature à intéresser en même temps celui qui s’attache avant tout à scruter les documens des temps ancien?, celui qui étudie dans les différentes étapes de la civilisation l’état des idées, les croyances, les aspirations de l’esprit, celui qui se plaît à étudier la marche de l’art, à constater les tendances diverses des diverses écoles, celui enfin que préoccupent spécialement les manifestations du beau ou les efforts pour le réaliser. L’annaliste, le moraliste et le philosophe, l’historien de l’art, et le simple observateur, que ne laissent indifférent ni les aspects multiples de la figure humaine ni les harmonieuses combinaisons des couleurs, peuvent donc y trouver également leur compte.


I.

Pendant près de deux siècles, ces peintures sont restées comme ensevelies sous le badigeon que leur infligea la barbarie d’une époque dont le goût perverti et exclusif ne tolérait pas les œuvres portant un caractère encore un peu primitif. En 1706, Girolamo Baruffaldi, alors qu’il écrivait la vie des artistes ferrarais, put encore les examiner et en juger, quoiqu’elles fussent très détériorées. En 1773, au temps de Scalabrini, elles n’existaient déjà plus. Entre 1830 et 1836, on en découvrit quelques fragmens, auxquels on emprunta, en 1838, des modèles de costumes pour la représentation d’une chasse à la cour de Borso. Mais c’est seulement en 1840 qu’a été rendu à la lumière, grâce au Bolonais Alessandro Compagnoni, tout ce que l’on voit aujourd’hui, A vrai dire, la décoration du grand salon de Schifanoia n’existe plus dans son entier. La muraille occidentale et la muraille méridionale menaçant ruine en 1493, il fallut les reconstruire, ce qui entraîna la perte des peintures qui les recouvraient. Sur les nouveaux murs, un artiste aujourd’hui inconnu en exécuta d’autres par des procédés peu solides, car, lorsqu’on essaya de les dégager de l’enduit sous lequel elles avaient disparu en même temps que les fresques des murailles orientale et septentrionale, la couleur tomba en grande partie avec le badigeon et l’on dut renoncer à poursuivre la tentative. Du reste, les cavaliers que l’on distingue vaguement à l’angle de la muraille méridionale auprès de la muraille orientale ne sont pas de nature à faire beaucoup regretter l’insuccès du grattage.


II.

La principale salle du palais de Schifanoia est longue de 24 mètres, large de 11, haute de 7m,50. On y entre par une étroite porte