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mais pourtant d’un très haut et ancien lignage de Coligny en Savoie, et autrefois souverain et très grand, ait fait trembler toute la chrestienté et remplie de son nom et de sa renommée ; tellement que lors, de l’admirai de France, en estoit-il plus parlé que du roi de France. »


I.

Le berceau des Coligny était en Bresse ; les sires de Coligny y étaient maîtres d’un petit territoire nommé le Revermont, ils étaient seigneurs d’Andelot et de Fromente. Jean III de Coligny quitta la Bresse et se fixa à Châtillon-sur-Loing, dans la seconde moitié du XVe siècle, sans doute pour échapper à la dure domination des ducs de Savoie. Son fils Gaspard épousa à Écouen Louise de Montmorency, fille de Guillaume, baron de Montmorency ; cette alliance unissait les Châtillon, car c’est désormais sous ce nom qu’on distinguait plus souvent les Coligny, à une des plus grandes maisons de France. Le maréchal de Châtillon eut quatre enfans de Louise de Montmorency, qui naquirent à deux ans d’intervalle : Pierre, qui mourut en bas âge, et Odet, Gaspard et François, plus tard bien connus sous les noms de cardinal de Châtillon, de Coligny et d’Andelot. Un dessin qui se trouve dans les galeries du duc d’Aumale et qui a été reproduit autrefois par la gravure, les montre arrivés à l’âge d’homme, debout et comme prêts à l’action, avec ces mots : Fratres Colinœi. Coligny est au centre, il est le vrai chef de famille, le valeureux et bouillant d’Andelot ne demande qu’à lui obéir, aussi bien que le cardinal.

Coligny n’avait que trois ans quand mourut son père, « bon et sage capitaine du conseil duquel le roy s’est fort servy tant qu’il a vescu, comme il avait raison, car il avait bonne teste et bon bras. » (Brantôme.) Sa mère Louise se fixa à Châtillon, avec ses enfans (elle en avait trois d’un premier mariage avec Ferry de Mailly) ; elle ne quittait guère sa maison que pour aller faire son service de dame d’honneur auprès de la reine Éléonore, femme de François Ier. Son frère, Anne de Montmorency, était au comble de la faveur, il était alors maréchal, gouverneur du Languedoc, grand-maître de France ; il avait épousé la nièce de Louise de Savoie, mère du roi.

Odet de Châtillon profita de cette faveur dès son plus jeune âge. Au moment où François Ier maria son fils à Catherine de Médicis, il obtint du pape quatre chapeaux de cardinal et en offrit un à Anne de Montmorency, qui le donna à l’aîné de ses neveux, âgé à peine de seize ans. C’est ce frère de Coligny qui fût désormais désigné sous le nom de cardinal de Châtillon, même après qu’il fut sorti de l’église. Gaspard fit des études sérieuses avec Nicolas Bérauld ; il