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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 juillet.

Non, certes, le pessimisme n’est pas une politique, et ce serait une triste, une bien vaine satisfaction de se complaire sans cesse à recommencer le procès des partis et des gouvernemens, à refaire d’un ton morose le compte de leurs fautes et de leurs excès. Non, l’opposition, la fronde perpétuelle, n’est ni un système ni un plaisir, et ceux qui ont la vraie passion de leur pays, qui ont le généreux souci de ses destinées compromises par les fausses politiques, aimeraient vraisemblablement beaucoup mieux voir l’habileté dans les conseils, la prospérité et l’honneur dans les affaires de la France; mais, en vérité, il y a des momens où il n’est pas facile d’être optimiste : c’est bon pour ceux qui ne voient rien et qui ne doutent de rien. Il n’est pas toujours aisé de garder sa bonne humeur devant les fautes qui s’accumulent qui s’enchaînent, qui, en définitive, retombent sur tout le monde et à la longue on ne peut se défendre d’un certain dépit à voir comment une situation, qui aurait pu être encore relativement favorable ou suffisante pour vivre, se trouve chaque jour perdue ou compromise par tous les abus d’une domination vulgaire de parti.

Assurément les républicains qui, sous des noms différens, se succèdent aux affaires depuis quelques années, ont eu en arrivant au pouvoir de singuliers avantages. Ils trouvaient des institutions acceptées, une nation prompte à se soumettre, des adversaires désarmés, des finances prospères, la paix morale et civile dans le pays. Ils n’avaient qu’à gouverner, avec un peu de modération et de bon sens, dans une situation où tout était assez facile. Ils se sont figuré que ce n’était pas assez républicain, qu’il fallait changer tout cela. Ils ont tout changé effectivement. Ils ont mis l’esprit de révolution dans la politique; ils se sont fait, pour vivre, des majorités avec lesquelles la première condition était de livrer au radicalisme les garanties libérales, les institutions éprouvées, la rectitude financière, la paix religieuse, et