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mesure légale la plus propre à sauvegarder la considération attachée au mandat dont ils étaient investis. » En vain, d’après le vœu émis par les conseils-généraux, il exprima le désir « que les sénateurs et les députés de l’Algérie, sans devenir membres du conseil supérieur, voulussent bien y entrer avec la faculté de prendre part à ses travaux et d’y avoir voix délibérative[1], » en vain encore, il renouvela, en 1878, les instances qu’approuvait l’opinion publique en Algérie afin d’obtenir des représentans des trois départemens « qu’ils consentissent à user du droit qui leur était offert d’assister aux séances avec voix délibérative lorsqu’ils le jugeraient nécessaire ou possible[2], » jamais il ne lui fut donné de triompher de scrupules respectables sans doute, mais dont j’ai peine, je l’avoue, à deviner les motifs.

Malgré cette abstention volontaire et si regrettable des mandataires de l’Algérie, il n’en est pas moins de toute justice de tenir en grande considération les opinions consciencieusement émises sur place au sein d’une assemblée délibérante par des hommes particulièrement versés dans les affaires locales et dont on ne saurait nier les lumières spéciales et la parfaite compétence. Le conseil supérieur du gouvernement est composé de trente-huit membres, dont dix-huit sont délégués par les conseils-généraux et les vingt autres membres de droit. C’est dire qu’aux jours où les membres de droit sont absens, ce qui est le cas ordinaire, la majorité appartient à l’élément élu. Quelle garantie d’indépendance ! Les membres de droit sont : l’archevêque d’Alger, les trois généraux de division commandant les trois provinces, les trois préfets et les chefs des services administratifs, judiciaires et militaires. Quel amas de connaissances techniques acquises par la pratique des affaires et par le maniement des hommes ! Les fonctions du conseil supérieur sont strictement définies par le décret du 7 août 1875. Il a mission « d’examiner le projet du budget, l’assiette et la répartition des impôts préparés par les soins du gouverneur-général. » Les procès-verbaux de ses délibérations sont publiés ; ils sont annuellement communiqués aux chambres ; tout le monde en peut prendre connaissance. C’est pourquoi, justement étonné d’avoir si rarement entendu évoquer, au sujet des affaires de l’Algérie, des témoignages, à mon sens, si probans et n’ayant d’ailleurs qu’à demi confiance dans mes propres appréciations et dans mon expérience personnelle, à coup sûr, insuffisante, j’entends m’appuyer de préférence sur les avis de tant de personnages parfaitement éclairés afin de

  1. Discours du général Chauzy, gouverneur-général civil de l’Algérie, prononcé à l’ouverture de la session du conseil supérieur du gouvernement (novembre 1877).
  2. Discours prononcé à l’ouverture de la session du conseil supérieur, par le gouverneur-général civil (novembre 1818).