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de celles qui paraissent appelées à un succès de plus en plus assuré, nous avons voulu exposer en termes généraux les services qu’elles rendent et nous servir de l’état dans lequel les derniers événemens les ont laissées pour indiquer aussi d’une manière sommaire les fautes qu’il convient d’éviter et les périls qu’il faut toujours craindre. Ces périls, en effet, tiennent souvent à des causes générales contre lesquelles on ne peut rien, mais qui deviennent plus ou moins redoutables selon la prudence avec laquelle ont été gérées les affaires particulières de la société ; à cet égard, on ne doit jamais se reprocher d’être trop pusillanime. Les crises peuvent, d’autre part être imputables seulement aux sociétés elles-mêmes, ce sont celles que provoquent les entreprises mal conduites, à savoir l’immobilisation du capital social, l’insuffisance des réserves, l’exagération dans la répartition des dividendes, etc.

Nous ne partageons point, en effet, l’opinion de ceux qui se préoccupent, dans des sociétés à revenu variable, de préparer à leurs actionnaires un revenu qui ne varie point, et, comme on dit en langage usuel, qui veulent autant que possible faire ressembler les actions à des obligations. Outre que l’événement vient démentir parfois les espérances souvent les plus justifiées et rendre ainsi inutiles les précautions prises, il nous semble plus conforme à la nature des choses, sans l’exagérer toutefois et sans méconnaître la nécessité d’économies suffisantes, de rendre variable le revenu des années suivant les variations mêmes des bénéfices, et de se conformer ainsi aux dispositions d’esprit des acheteurs de ces titres mêmes. Les possesseurs d’actions sont de tout autre ordre que les possesseurs d’obligations, dont le revenu est immuable; ceux-ci ont en vue les chances d’un remboursement plus élevé, qu’ils attendent à date incertaine, avec la chance d’une sorte de loterie; les premiers, pour obtenir des bénéfices immédiats et plus considérables, veulent que les entreprises auxquelles ils s’intéressent soient conduites avec une habileté de plus en plus grande; de là naissent les améliorations et tous les progrès.

Mais, si la variabilité dans le rendement des sociétés dont nous nous occupons veut être maintenue, il importe de ne pas distribuer de trop larges bénéfices, surtout lorsqu’ils sont dus à des causes exceptionnelles et ne naissent pas en quelque sorte de l’industrie proprement dite et spéciale. Pour des établissemens de ce genre, une sorte de modestie est de rigueur. Moins ils auront de variations dans le prix de leurs titres, ce qui est le résultat des variations trop brusques des dividendes eux-mêmes, plus ils offriront de gages de sécurité et obtiendront la confiance du public. Comme les peuples les plus heureux sont ceux qui n’ont pas d’histoire, les sociétés de