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bateaux de pêche en nombre considérable appelés par eux bâtimens de guerre ; comme armement, ces coquilles de noix n’ont ni canons ni caronades. En temps de paix, ils restent vides de leurs équipages et tombent rapidement hors de service. Leur seule utilité sera de servir dans quelques années de bois à brûler. Des officiers coréens sont allés dernièrement au Japon, mais en voyant la flotte de guerre de leurs intelligens voisins, ils ont compris que tout était à faire chez eux.

En Corée comme en Chine, beaucoup de villes sont murées et les forteresses nombreuses. La principale est celle de Kang-Hoa, placée à l’entrée du fleuve qui mouille les murs de la capitale. Ces citadelles servent d’enceinte à des villages de premier ordre, Tonkou-Wagni-fu, par exemple. Elles sont pour la plupart édifiées sur des collines, entourées d’un mur de granit de 3 mètres de hauteur sur 1 mètre d’épaisseur et percées de distance en distance de meurtrières. Un général japonais qui a pu les visiter nous a affirmé qu’un seul canon de siège suffirait pour les abattre et les réduire en poussière. Les administrations du gouvernement sont presque toujours installées dans l’intérieur de ces places fortes. Les bureaux occupent de vastes bâtimens recouverts de tuiles. Les Coréens considèrent ces établissemens comme ce qu’il y a de mieux en architecture. C’est pourtant fort laid et mal entretenu, excepté à Tokou-Wagni-fu, où l’on remarque quelques constructions assez bien achevées.

Dans les villes, même dans celles de premier ordre, les maisons laissent à désirer sous bien des rapports et sont, pour la plupart, de véritables huttes. Celles des habitans du nord du Japon et de l’île chinoise de Formose ont l’aspect de palais comparées aux cabanes des Coréens. Construits en pierre ou en terre, les grands édifices mesurent 15 mètres carrés ; le plus souvent, ils occupent une superficie de moins de 10 mètres ; leur hauteur n’a guère plus de 1m,50. On creuse, il est vrai, le sol à l’intérieur de 0m,30 à 0m,60, et on y pose des poutres, qui supportent un misérable plancher. Et encore, les riches seuls se paient ce luxe ; les pauvres se contentent, pour dormir, d’étendre quelques nattes sur la terre. Ces habitations n’ont qu’une seule porte et pas de fenêtres ; il est presque impossible à un homme un peu grand de s’y tenir debout. À Fousan, où les Japonais ont un comptoir, elles sont plus grandes et mieux construites. Une des choses qui frappent le plus les étrangers, c’est que les indigènes n’ont pas de puits ; ils paraissent ignorer les principes de la construction d’un aqueduc. Leur méthode pour avoir de l’eau est la suivante : ils creusent un trou de six pieds de profondeur et de trois pieds de diamètre près d’un ruisseau qui descend d’une colline, puis l’eau est amenée dans ce trou au