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Le 5 pour 100 turc est le seul fonds public qui ait reculé cette quinzaine. La fixation au mois de décembre de la date pour l’échange des titres est la cause principale de cette faiblesse. La spéculation suppose qu’un fonds turc coté 80 francs ou 77.50 et rapportant 5 francs, paraîtra beaucoup plus cher que le même fonds coté 8 francs ou 7.75 et rapportant 0 fr. 50. Et c’est pourtant à ce simple changement de cote, correspondant à un échange de titres, que se réduit cette fameuse conversion turque dont la menace pèse depuis si longtemps sur notre marché libre.

L’Unifiée se tenait à 307 francs environ, lorsque le monde financier a été surpris par la nouvelle que le gouvernement du khédive venait de décréter la suspension de l’amortissement. On aurait pu craindre une chute violente de l’Unifiée. Ce titre cependant n’a reculé tout d’abord que de quelques francs et presque aussitôt s’est relevé à ses anciens cours. La spéculation s’est ravisée, en effet, en songeant que le gouvernement anglais, engagé à fond sur les bords du Nil, se résignera fatalement aux dernières conséquences de ses actes arbitraires et sera tôt ou tard amené à offrir sa propre garantie aux créanciers de l’Égypte en compensation du sacrifice qu’il leur impose et de ceux qu’il pourra encore leur imposer.

L’émission des obligations du Panama ayant eu tout le succès qu’il était permis d’espérer dans les circonstances où se faisait l’opération, les établissemens de crédit qui ont ouvert leurs guichets à la souscription ont récolté un bénéfice fort appréciable dans une année de disette. Leurs cours cependant n’ont été nullement affectés par cet incident, et l’immobilité la plus complète est restée le trait caractéristique dans tout le compartiment de la cote. Les porteurs des titres de ces sociétés ne vendent pas, pensant assez justement que la baisse doit avoir dit son dernier mot, mais aucun capitaliste ne se soucie encore de rentrer dans ce genre de valeurs, les dividendes de 1884, selon toute vraisemblance, ne devant pas valoir beaucoup plus que ceux de 1883.

La Banque de France a reculé de 50 à 60 francs, les bénéfices étant en diminution. La Banque de Paris n’a pas bougé à 770 francs. Le Crédit foncier seul a monté, encore de bien peu. Les achats des derniers jours l’ont porté de 1,315 à 1,323. Dans le courant du mois prochain, cet établissement va émettre un emprunt, en obligations communales à lots, 600,000 titres de 500 francs, rapportant 15 francs, participant à six tirages de lots par an, et dont le prix d’émission sera probablement 435 francs. Cet appel au crédit est motivé par l’affluence des demandes de prêts adressées au Crédit foncier par les chambres de commerce, qui cherchent à se procurer les fonds nécessaires pour assurer l’exécution des travaux des ports, dont l’état s’est déchargé sur l’initiative privée.