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de l’autre côté, le parlement qui doit répondre ; d’un côté, le gouvernement qui demande les moyens d’agir et, de l’autre côté, le parlement qui est appelé à donner au gouvernement les instrumens nécessaires à son action, — il faut que le contrat soit limité dans sa durée. S’il ne l’était pas, le parlement aliénerait sa liberté et le gouvernement, qui dort être le serviteur, deviendrait en réalité le maître, son maître, à lui, ayant abdiqué dans ses mains. De là le second principe : le vote du budget doit être annuel.

Mais comme la proposition que fait le gouvernement ne peut être acceptée que si elle a été examinée avec maturité ; comme le parlement se trouverait engagé malgré lui si l’exécution du budget précédait l’assentiment qu’il a le droit de donner, mais aussi de refuser, il en résulte que le budget ne doit pas seulement être annuel : il doit en outre être préalable ; c’est le troisième principe.

Enfin le budget voté est comme l’acte de naissance d’une personne destinée à se mouvoir pendant toute une année. Il consacre une série d’opérations qui ont ce lien commun d’être entreprises dans une période de temps déterminée. Cette série d’opérations constitue un ensemble qui doit être comparable dans le passé et dans l’avenir avec un ensemble de séries semblables Pour que le budget puisse être contrôlé dans son exécution, comme il a dû l’être dans sa préparation, il faut donc qu’il ait une personnalité comptable, afin qu’aucun acte accompli pour son compte ne puisse passer inaperçu. C’est le quatrième principe.

Reprenons avec plus de détail l’examen de chacun de ces principes, en les jugeant dans leur application à la gestion de nos finances et dans leurs rapports avec le gouvernement parlementaire.

Le principe de l’unité est un principe de clarté. Personne ne peut connaître sa situation financière qu’en l’embrassant tout entière. Un commerçant ne peut savoir si les affaires qu’il a faites sont bonnes qu’à la condition de les passer toutes en revue ; car s’il ne tenait compte que des opérations à bénéfice et s’il oubliait celles qui se liquident en perte, il pourrait se croire riche quand il serait ruiné. Il en est de même pour un état. La situation d’un budget d’état ne peut être connue que si elle a été examinée sous toutes ses faces. Ce n’est pourtant que depuis 1815 qu’il y a de l’unité dans le budget français. Pendant la révolution, les affaires de finances se traitaient au fur et à mesure qu’elles se présentaient, et on imaginait des expédiens quand il fallait se tirer ; d’embarras. On n’avait du budget ni la chose ni le nom, et Ramel, qui a été ministre des finances, pendant trois ans de l’an IV à l’an VII, et qui