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l’eau n’y sont guère plus abondantes que dans les solitudes du Sahara ou dans les steppes stériles de l’Atacama, dans l’Amérique du Sud. Ce qu’elle parait offrir, comme cette dernière contrée, ce sont de grandes richesses minérales. On y exploitera des mines et peut-être des usines métallurgiques. Moins maltraité, le territoire de l’intérieur pourra se prêter à l’élève du bétail, à l’agriculture pastorale, à la manière des hauts plateaux de l’Algérie. Une région qui offrirait plus d’avantages pour l’établissement de colonies allemandes et pour recevoir de nombreux émigrans, c’est le Zanzibar, dont la prise de possession a été recommandée par l’amiral Livonius. Au Zanzibar, le souffle des moussons rafraîchit toute l’année durant les îles voisines du continent, tandis que, sur le continent même, les hautes terres fertiles, dont l’altitude tempère l’ardeur du climat torride, se prêtent à recevoir des cultivateurs européens. Les indiscrétions de l’amiral Livonius ont bien éveillé de ce côté les susceptibilités de l’Angleterre. Reste à savoir si le gouvernement allemand tiendra plus de compte de ces susceptibilités et ne passera pas outre, comme il a fait pour les prétentions des Australiens touchant la Nouvelle-Guinée et la Mer du Sud.

Le premier essai de politique coloniale tentée par le gouvernement allemand à propos des établissemens dans les lies de la Mer du Sud n’a pas été heureux. Les armateurs des villes hanséatiques ayant réussi à commercer avec tous les ports du monde, les Allemands n’ont pas songé pendant longtemps à s’imposer la charge de colonies leur appartenant en propre. Aussi, lorsque le Reichstag fut saisi, en 1880, d’une demande de subvention pour des établissemens fondés aux îles Samoa, dans la Mer du Sud, cette demande se trouva rejetée. Il s’agissait d’une somme annuelle de 300,000 marcks, au maximum, à accorder, sous forme de garantie d’intérêt, à l’association allemande de commerce maritime fondée à Berlin, au capital de 8 millions, pour l’exploitation de plantations dans l’archipel samoan. Pareilles subventions ont été accordées naguère par le gouvernement hollandais à la Nederlandsche Handel Maatschappy, qui réussit parfaitement. Mais, au Reichstag allemand, on y regarde à deux fois avant de consentir à subventionner des entreprises privées avec des fonds de l’état. Vainement l’ambassadeur d’Allemagne à Paris, le prince de Hohenlohe, parlant en place du ministre des affaires étrangères, insista sur l’importance attachée à l’acceptation de la proposition pour la politique de l’empire. L’honneur du pavillon allemand, les intérêts du commerce, l’exemple de la France, furent invoqués tour à tour sans réussir à décider le parlement. Beaucoup de chauvins eussent préféré prendre des colonies toutes faites et préparées par des voisins