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dangereuse pour des bâtimens de haut bord. Mais dans des proportions plus modestes, la possession de ces îles offre indirectement, des avantages réels et considérables, ne fût-ce que parce que les marchés de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande lui sont assurés. Ces colonies, jusqu’à présent obligées d’envoyer chercher à Java et à l’île Maurice le thé, le café, le sucre, enfin tous les produits coloniaux dont elles ont besoin, s’habitueront à s’en pourvoir ici à mesure que la culture s’étendant, les îles Fiji, bien plus rapprochées que l’Inde hollandaise et Maurice, seront à même de répondre à leurs demandes.

Fiji offre en ce moment un spectacle curieux, et, ce semble, satisfaisant. Dans le monde indigène, la paix partout. Les chefs des grandes tribus, transformés en pairs et en préfets, vaquant à leurs affaires administratives et parlementaires, ne s’aimant pas plus que par le passé, mais ne troublant en aucune façon l’ordre public, en général, pas ou peu d’actes de violence. Le peuple, gai, inoffensif, peu industrieux, mais content de son sort. Jusqu’à présent, l’autonomie octroyée aux indigènes, dans certaines limites, n’a produit que de bons résultats.

Dans la population européenne, qui s’accroît rapidement, une transformation presque complète s’est opérée au cours des dix dernières années. Le spadassin légendaire d’autrefois a cédé le terrain à des gens honnêtes et laborieux, dont le travail est fécondé par des capitaux provenant principalement de Sydney. Sous plus d’un rapport, la jeune colonie s’assimile de plus en plus à l’Australie et à la Nouvelle-Zélande. La culture du sol fait des progrès sinon rapides, du moins continus, et le commerce a pris dans ces dernières années un élan inattendu. En 1883, on a constaté dans les caisses de l’état un excèdent de revenu comparativement considérable[1].

J’ai reproduit dans ces notes, consciencieusement et fidèlement, les informations que j’ai puisées aux sources les plus diverses et les plus autorisées. J’ai aussi placé côte à côte les jugemens si divers que j’ai entendu énoncer sur les hommes et sur les choses de ce pays. Mais c’est à cela que doit se borner ma tâche. Il ne m’appartient pas de donner une opinion personnelle. Tout ce que je me permettrai d’affirmer, c’est que l’Angleterre, en prenant possession des îles Fiji, a fait une bonne action et une bonne affaire.


HÜBNER.

  1. De 26,000 livres sterling.