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LA
QUESTION DU LATIN

La Question du latin, par Raoul Frary. Paris, 1885 ; Cerf.

Voici un livre très remarquable, — qui le serait davantage encore s’il était un peu moins inspiré de l’anglais, d’Herbert Spencer et de Macaulay, — mais un livre hardiment pensé, vivement écrit, adroitement fait surtout, par un fort habile homme, et, pour toutes ces raisons, plus qu’agréable à lire. Si cependant nous n’en saurions partager toutes les idées, ou accepter toutes les conclusions, et bien moins encore approuver les tendances, dirons-nous que nous le regrettons ? En aucune manière. Ce serait envier à M. Frary le bruit qui s’est fait autour de cette Question au latin, qui ne se serait point fait si M. Frary n’y avait pris le parti qu’il y prend. Et puis, quand certaines idées, si fâcheuses que nous les trouvions, sont dans l’air, comme l’on dit, quel grand avantage voit-on ou croit-on voir à ce qu’elles soient mal soutenues, par de puériles, par de vaines, par de déraisonnables raisons ? Car alors elles n’offrent point de prise, on n’ose pas les discuter, elles se condamnent d’elles-mêmes, à ce qu’il semble ; et cependant elles ne continuent pas moins de faire leur chemin dans le monde. Bien loin donc de nous plaindre, selon la formule, que M. Frary ait dépensé tant de verve, de talent, et d’art au service d’une mauvaise cause, dont le triomphe serait désastreux, nous l’en félicitons d’abord, et nous l’en remercions ensuite. Les raisons que l’on essaiera d’opposer aux siennes devront être, en effet, d’autant plus fortes que les siennes sont plus spécieuses, plus séduisantes, plus