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LA
MARINE DE 1812
D'APRES LES SOUVENIRS INEDITS DE L'AMIRAL BAUDIN

L’ancienne marine, — la marine d’avant Richelieu, — ne connaissait que trois grades, comme la marine des galères : enseigne, capitaine commandant, capitaine pourvu de la commission d’amiral. En plus d’une circonstance on pourrait souhaiter qu’il en fût encore ainsi. On trouverait alors dans chaque grade, suivant la nature de la mission à remplir, des prudens ou des audacieux, des Tourville ou des Nelson, des Doria ou des don Juan d’Autriche. On a remarqué que les nations, au sortir de la guerre civile, deviennent presque toujours des nations conquérantes : la raison en est simple ; la guerre civile engendre de jeunes généraux. L’empereur Napoléon ne s’arrêtait guère à ces distinctions gênantes de capitaine de vaisseau et de capitaine de frégate, de vice-amiral et de contre-amiral ; il semble même qu’il ait montré, vers l’année 1812, un penchant très marqué à chercher les hommes dont il avait besoin dans les rangs inférieurs de cette marine si cruellement éprouvée qu’avec une persistance infatigable il appelait une dernière fois à renaître. Le commandement de plusieurs frégates fut à cette époque confié à des officiers que leur grade ne destinait à commander que des corvettes ou des bricks. Charles Baudin fut un de ces capitaines.

Les vaillans officiers, espoir, dans leur jeunesse, d’un règne qui